« la Nuit de Valognes », d’Éric‐Emmanuel Schmitt, Théâtre Notre‑Dame à Avignon

la Nuit de Valognes © P. Guérillot

Une nuit bien calme

Par Cédric Enjalbert
Les Trois Coups

Le Lucernaire-Avignon, désormais Théâtre Notre-Dame, a investi une chapelle du xive siècle, dans laquelle se joue, peut-être un peu religieusement, la pièce d’Éric-Emmanuel Schmitt : « la Nuit de Valognes ».

Comédie acerbe sur l’amour, la Nuit de Valognes s’inscrit dans la tradition du renversement théâtral. Quand des valets prennent la place des maîtres, quand l’espace d’une nuit, d’un songe, les situations les plus improbables deviennent possibles, quand, comme ici, le bourreau Don Juan devient Don Juan le condamné. Condamné à aimer, car tel est bien le châtiment qu’infligent, à l’issue d’une nuit de procès dans un manoir normand, six femmes victimes du séducteur.

La chapelle, obscure et mystérieuse, donne un cadre parfait à la pièce. La scénographie et les décors sobres, de même que le jeu de lumières, rendent l’atmosphère d’un lieu à la fois reculé et hors du temps. Les costumes, enfin, sont beaux. Il n’y a de la part des acteurs aucune fausse note.

Et pourtant, il manque à ce spectacle un supplément d’âme. Il y a dans le domaine de l’écrit ce qu’on appelle une « littérature culinaire ». Celle‑ci flatte le palais et lui donne à goûter les saveurs attendues, sans surprise : si l’on applique la recette, le plat est réussi. La littérature, comme la gastronomie, commence avec la déception des attentes, un bouleversement des habitudes, une épice qui vient déranger le goût établi. C’est, semble-t‑il, ce qui manque à ce spectacle bien exécuté, mais un peu fade. L’interprétation du texte, virant parfois au tragique ou au drame psychologique, paraît en outre oublieuse du caractère excessif de la comédie.

Un peu plus de fantaisie et d’audace eurent sans doute mieux valorisé une mise en scène soignée et des comédiens talentueux. Il y a des nuits blanches, de folie, de rêve ou d’enfer. Celle‑ci est calme, tout simplement. 

Cédric Enjalbert


la Nuit de Valognes, d’Éric‑Emmanuel Schmitt

CS Cie • 106, rue Brancion • 75015 Paris

01 56 08 33 89

Mise en scène : Régis Santon

Interprètes : Bernard Malaka, Marie‑France Santon, Anne Jacquemin, Sacha Stativkine, Camille Cottin, Vanessa Kryceve, Régis Santon, Stéphanie Lanier, Caroline Alaoui, Mélaine

Costumes : Pascale Bordet

Lumières : Laurent Béal

Photo : © P. Guérillot

Le Lucernaire-Théâtre Notre-Dame • 13‑17, rue du Collège‑d’Annecy • Avignon

Réservations : 04 90 85 06 48

Du 6 au 28 juillet 2007 à 20 h 15

Durée : 1 h 45

15 € | 11 €

À propos de l'auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Du coup, vous aimerez aussi...

Pour en découvrir plus
Catégories

contact@lestroiscoups.fr

 © LES TROIS COUPS

Précédent
Suivant