« le Premier », d’Israël Horovitz, Aktéon Théâtre à Paris

« le Premier » © D.R.

Une quête existentielle

Par Laurent Schteiner
Les Trois Coups

On ne présente plus « le Premier », la pièce culte d’Israël Horovitz, mise en scène par Léa Marie‑Saint-Germain à l’Aktéon Théâtre. Cette pièce, interprétée avec brio par une troupe de jeunes comédiens issus des cours Florent, m’a enchanté par la justesse de jeu et de ton. Cette pièce originale sera présente au prochain Festival d’Avignon. Une belle consécration pour ces comédiens volontaires et dynamiques.

Le Premier est sans conteste l’une des œuvres les plus jouées d’Horovitz. Cette fable philosophique traite des conflits de cinq individus (quatre hommes et une femme), qui font la queue derrière une ligne blanche. « Ce qui compte avant tout est d’être le premier ! » Horovitz laisse le spectateur dans l’expectative. Mais, au fil du temps, le public se désintéresse du thème principal pour se concentrer sur cette petite communauté aux prises avec ses propres démons.

On doit reconnaître tout le talent d’Israël Horovitz à tenir son public en haleine avec une simple ligne blanche et le dessein de ces individus à obtenir à tout prix ce fameux statut de premier. Au début, les personnages ne sont pas avares de ruses pour conquérir cette première place. Par exemple, une femme présente dans la queue exacerbe la libido des hommes au point de devenir l’objet de leurs convoitises. Chacune d’elles est rythmée au son enivrant de célèbres musiques de jazz ou de rock.

« le Premier » © D.R.
« le Premier » © D.R.

« Ceux qui partent à la chasse perdent naturellement leur place ! » Puis la tension monte, palpable, plus forte, et plus violente. Les règles de fair-play disparaissent jusqu’au dénouement final, où chaque personnage dispose d’un petit morceau de ligne blanche et peut ainsi revendiquer sa place de premier. Paradoxalement, cette quête n’a plus de valeur ni de sens.

L’absence de scénographie sert une mise en scène alerte permettant aux spectateurs de se focaliser davantage sur le jeu des personnages. Leurs personnalités sont bien dessinées. Elles évoluent au cours de la pièce avec des intentions qui surprennent les spectateurs.

Le jeu des comédiens, servi par un texte de qualité, est remarquable. Ils savent faire preuve d’un jeu plein d’énergie et de naturel. La mise en scène insuffle le dynamisme nécessaire à cette pièce, qui réclame un jeu très enlevé. Il est difficile de distinguer un comédien plus qu’un autre. Cependant, le jeu d’Aurélien Gouas (Stephen) m’a enthousiasmé par sa force et son énergie, et m’a rappelé à certains égards le jeu de Malcolm McDowell dans Orange mécanique. Cette parabole drôle et inclassable d’Israël Horovitz traduit avec précision ce besoin existentiel de certains de nos semblables de laisser une trace de peur de sombrer dans l’anonymat. 

Laurent Schteiner


le Premier, d’Israël Horovitz

Adaptation : Léa Marie‑Saint‑Germain

Avec : Pierre‑Édouard Bellanca (Fleming), Chiraz Aïch (Molly), Aurélien Gouas (Stephen), Arnaud Perron (Arnall) et Clément Génin (Dolan)

Aktéon Théâtre • 11, rue du Général‑Blaise • 75011 Paris

Du 14 mai au 7 juin 2008, du mercredi au samedi à 20 heures

Réservations : 01 43 38 74 62

Durée : 1 h 20

16 € | 10 €

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