« les Enivrés », d’Ivan Viripaev, Théâtre de l’Iris à Villeurbanne

rideau-rouge

Gueule de bois

Par Trina Mounier
Les Trois Coups

C’est l’histoire d’un petit théâtre qui s’est construit un public courageusement au fil des années. Sympathique et honorable mais hélas artistiquement décevant.

On aimerait en effet ne dire que du bien de cette troupe qui, contre vents et marées, crée chaque année un à deux spectacles, organise un festival, soutient d’autres jeunes compagnies et tient solidement le rôle de théâtre engagé en quartier populaire. Philippe Clément, à la barre, ne se contente pas de proposer des classiques, il met un point d’honneur à dénicher de nouvelles écritures. Ivan Viripaev est de celles-ci. Hélas.

« Les Enivrés ». Avec un tel titre, j’aurais dû me méfier. D’autant que l’auteur le prend au pied de la lettre. En une dizaine de tableaux, il nous présente des portraits d’hommes et de femmes ivres dont le vocabulaire n’excède pas 500 mots, tous du même champ lexical, celui de la merde, de l’ordure, de l’ordure, de la merde, en boucle.

On l’a compris, le monde n’est pas rose, il pue, les couples se trompent sans allégresse, les prostituées pleurnichent sur les trottoirs, les ivrognes tiennent des propos lacunaires et répétitifs traversés de borborygmes.

Potion contre l’alcoolisme

Parfois, ce petit monde, où les hommes pérorent tandis que les femmes s’esclaffent vulgairement et idiotement, découvre Dieu et se lance dans des semblants de discours mystiques : nous sommes en Russie, que diable ! C’en est une caricature en tout cas. De temps à autre, ici ou là, se glisse une scène complètement surréaliste qui renforce l’absurde du reste.

Pas de texte, donc, ou plutôt si, mais bavard et creux. Pour décor, un univers gris, bien sûr, avec des toiles peintes en fond de scène, grises elles aussi. Entre chaque scène, des musiques disparates font le grand écart. Au début de chacune, un extrait vidéo (en noir et blanc) annonce ce qui va suivre sans que cela apporte quoi que ce soit en matière de sens ni à la dynamique du spectacle. Mention spéciale aux costumes d’Éric Chambon, colorés, qui témoignent d’une certaine recherche.

Quant aux comédiens, dont il faut louer l’engagement et l’énergie, ainsi que la diction en ces temps où nombre d’acteurs dans de grands théâtres s’expriment à la limite de l’audible, ils jouent tout sur le même ton (le texte ne les aide pas, on doit en convenir, à recourir aux nuances, subtilités et variations). Ils surjouent en permanence l’effondrement, le déclin, avec parfois des sursauts : ils craquent, pètent les plombs, hurlent, puis retombent dans une léthargie avinée. L’ensemble est assez affligeant. 

Trina Mounier


les Enivrés, d’Ivan Viripaev

Traduction : Tania Moguilevskaia et Gilles Morel

Mise en scène : Philippe Clément

Assistante : Louise Paquette

Avec : Béatrice Avoine, Caroline Boisson, Philippe Clément, Hervé Daguin, Émilie Guiguen, Judicaël Jermer, Étienne Leplongeon, Louise Paquette, Didier Vidal

Création vidéo : Colas et Mathias Rifkiss

Création visuelle : Étienne Leplongeon

Création lumières et scénographie : Élisabeth Clément

Costumes : Éric Chambon

Les traductions d’Ivan Viripaev sont publiées aux éditions Les Solitaires intempestifs à Besançon

Titulaire des droits : Henschel Schauspiel Theaterverlag Berlin GmbH

Agent de l’auteur pour l’espace francophone : Gilles Morel

Production : Théâtre de l’Iris

En coproduction avec le Théâtre des Pénitents de Montbrison

Théâtre de l’Iris • 331, rue Francis-de‑Pressensé • 69100 Villeurbanne

04 78 68 86 49

www.theatredeliris.fr

Du 9 au 26 mars 2016 à 20 heures du mercredi au samedi, et le dimanche 20 mars à 16 heures

Durée : 2 heures

De 4 € à 15 €

Dès 15 ans

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