Premier festival Viens dans mon île, à L’Île‑d’Yeu, bilan

Viens dans mon île 2012

Viens dans mon île :
pari réussi !

Par Léna Martinelli
Les Trois Coups

Succès mérité pour le premier festival de L’Île‑d’Yeu, Viens dans mon île, qui s’est déroulé du mardi 7 au dimanche 12 août en Vendée. La qualité de la programmation a touché plus de 5 000 personnes, ravies de découvrir les talents prometteurs des premières parties et d’apprécier la prestation des têtes d’affiche, Thomas Dutronc, Laurent Voulzy et Soldat Louis.

Thomas Dutronc © Yann Orhan
Thomas Dutronc © Yann Orhan

Saluons les chiffres de fréquentation (l’équivalent de la population îslaise), même si davantage de continentaux auraient pu faire une petite escapade depuis la côte vendéenne. Le festival ne s’appelle-t‑il pas « Viens dans mon île » ? Certes, cette phrase est empruntée à une chanson de Thomas Dutronc qui a ouvert la première édition. Mais l’un des intérêts n’est‑il pas d’ouvrir L’Île‑d’Yeu à tous vents ?

Des pass plus avantageux (90 € pour 3 concerts au lieu de 99 € si l’on achète les concerts séparément !) et des hébergements adaptés pour l’occasion (avec notamment une extension conséquente du camping, pourquoi pas sur les plages du Ker-Châlon) pourraient inciter le public du festival à rester toute la semaine pour assister à l’ensemble des concerts. Reste à convaincre l’ensemble des Îslais de l’intérêt d’une telle initiative, d’éviter l’avis de tempête. Qu’on pense un peu au festival des Vieilles Charrues à Carhaix, dans le Finistère (aujourd’hui, l’un des plus importants des musiques actuelles en Europe) et les difficultés de ses débuts (les réserves sur l’accueil des « djeuns », les problèmes de sécurité, et l’impact sur l’environnement, les investissements nécessaires…).

C’est qu’il faut justement se donner les moyens pour réussir de tels projets. Organiser un festival réclame de l’expérience, des contacts, le soutien de nombreux partenaires (publics et privés). Avec cette première édition réussie, l’équipe peut être fière d’avoir su relever le défi en un temps record. D’autant que le festival, conçu en mars, n’a pu bénéficier de subventions. Compte tenu des enjeux, les bailleurs de fonds pourraient s’associer aux prochaines éditions. Une communication plus musclée, surtout en direction du public continental, est également indispensable.

Car il faut que cela se sache, aussi bien dans le milieu professionnel qu’auprès du public : dans ce cadre exceptionnel de la citadelle à Port-Joinville, le déplacement en vaut vraiment la peine. Et si la programmation de ce premier festival était résolument axée sur les musiques actuelles françaises, il y en a eu pour tous les goûts, avec des ambiances bien distinctes à chaque soirée, histoire de toucher tous les publics.

Des sourires ou des grimaces ?

Pour commencer sous les meilleurs auspices : légèreté et bonne humeur. Après la fraîcheur de Claire Danlalune, la réflexion a soufflé sur la citadelle. Sans avoir l’air d’y toucher, Thomas Dutronc nous éclaire sur l’état du monde, en restitue les vibrations au détour d’une phrase. Quand il chante Le monde est foutu, il l’agrémente d’une chute en forme de chapeau pointu : « turlututu ». Il dit des sourires qui peuvent se révéler être des grimaces, mais toujours dans un esprit « bon enfant ». D’ailleurs, des sketches agrémentent le concert, et les artistes s’amusent sur scène, on le sent. En guise de fil rouge, l’insouciance, celle de Silence on tourne, on tourne en rond, celle qui autorise, même adulte, à tomber encore en embuscade pour laisser s’exprimer le gamin qui est en nous. Et en pleines vacances, cela convient parfaitement ; en période de crise, cela fait du bien.

Ça joue bien, aussi, d’un point de vue musical. Autour de cet excellent guitariste nourri au biberon swing qu’est Thomas Dutronc, ses complices s’éclatent avec la bossa dans un concert à la sonorité pop assumée. Difficile de se défaire de ses mélodies à l’écriture binaire ! Sans clinquant ni effet tape-à‑l’œil, plusieurs d’entre elles nous reviennent insidieusement au détour d’une ballade.

Du rhum et de la bière

Belle cohérence, également, pour la deuxième soirée, avec les compositions locales des Tribordais, les gars de L’Île-d’Yeu qui aiment tant partager avec leur public ces chansons entonnées souvent dans les bars, ces moments de convivialité : Nous irons naviguer, le Viola, Vendée Globe… Un répertoire marin qui donne soif ! Pas moins de 33 fûts de bière écoulés durant la soirée (contre 13 pour le concert plus familial de Thomas Dutronc) ! Faut dire qu’avec leur single Du rhum, des femmes, de la bière, nom de Dieu !, Soldat Louis n’encourage guère à consommer de la limonade.

Cette bande de rockers partage sa musique avec le cœur, généreux dans la fête, et les poings serrés pour protéger son identité bretonne. Après de nombreuses années de déferlantes et d’aventures homériques les menant jusqu’au si redoutable abordage de L’Olympia, ces loulous ont donc jeté l’ancre à L’Ile-d’Yeu. Sous ces latitudes moins houleuses, le Cap’tain Louis et son équipage, à l’arsenal scintillant et aux bottes cirées, sont toujours aussi impatients d’en découdre. Solides et fiers, ces gaillards viennent de Lorient et le font savoir. Dans ce concert aux accents rock dominants, le biniou sonne bien le rappel.

Laurent Voulzy © D.R.
Laurent Voulzy © D.R.

Ça plane pour Voulzy

Beaucoup attendaient le concert de cette troisième soirée. Mais à en juger par la mine dubitative de la plupart, peu savaient que Laurent Voulzy présentait son dernier album, Lys & Love. « Bad trip » pour certains, qui se sont demandé ce qu’ils étaient venus faire dans cette galère.

L’origine de ce projet nourri des deux passions du chanteur (l’Angleterre et le Moyen Âge) : un poème de Charles d’Orléans écrit depuis son cachot anglais où il fut emprisonné durant vingt‑cinq ans. Le choix de la citadelle, ancienne caserne militaire, était tout à fait approprié. Néanmoins, le public n’a pas été conquis par ces déclarations d’amour courtois et digressions aux mélodies flottantes qui transportent loin, très loin, sur les terres de Glastonbury, où ressurgissent les légendes du roi Arthur. Des envolées planantes qui traduisent une certaine quête spirituelle. Cela tombe bien, c’était dimanche ! Mais les puristes ont pu être également décontenancés par les chants grégoriens fondus avec des harmonies électro.

Quel beau cadeau, pourtant, que ce concert aux accents médiévaux qui amène le chanteur-troubadour dans des abbayes et cathédrales lors d’une tournée-évènement. Jamais venu à L’Île‑d’Yeu, malgré sa passion des îles, Laurent Voulzy a accepté d’écourter son séjour en Corse pour faire résonner les murs de la citadelle. Galops de chevaux, croassements de corbeaux, fer des épées qui s’entrechoquent, vent qui passe entre les herbes… Rien ne manquait. Ambiance gothique, donc ce soir-là, avec force fumigènes, bougies à gogo, scène saturée de lumières vives.

Pour cette épopée au mysticisme assumé, Laurent Voulzy s’est accompagné d’une formation instrumentale (violon, violoncelle, harpe, guitare, clavier, basse acoustique et percussions) qui porte haut son rêve. Mais, heureusement, la guitare acoustique n’était pas loin, et, la générosité toujours en bandoulière, ce chanteur si populaire a fini par offrir au public, après les rappels, quelques-uns de ces tubes, troquant alors le lys pour la marguerite de son single le Pouvoir des fleurs.

Un vrai miracle que d’entendre le public chanter en rythme et si juste, vibrant ainsi à l’unisson avec une vedette prête à s’effacer pour donner du bonheur aux gens, le plus simplement du monde. Sans rhum, ni bière… Le Cœur grenadine

Léna Martinelli


Viens dans mon île, 2012

http://www.viens-dans-mon-ile.com/

contact@viens-dans-mon-ile.com

La Citadelle • 85350 L’Île‑d’Yeu

Accès fléchés depuis Port-Joinville

Du 7 au 12 août 2012 à 20 heures

  • Mardi 7 août 2012 à 20 heures : Thomas Dutronc (en première partie : Claire Danlalune)
  • Jeudi 9 août 2012 à 20 heures : Soldat Louis (en première partie : Les Tribordais)
  • Dimanche 12 août 2012 à 20 heures : Laurent Voulzy (en première partie : Manon)

Navettes spéciales après les concerts du mardi 7 août et dimanche 12 août

www.compagnievendeenne.com

0825 139 085

Pass 3 jours 90 €

Thomas Dutronc : 35 €

Soldat Louis : 25 €

Laurent Voulzy : 39 €

Photo de Thomas Dutronc : © Yann Orhan

Photo de Laurent Voulzy : © D.R.

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