Joli bric‑à‑brac pour grandes questions
Par Laura Plas
Les Trois Coups
Bric-à-brac de jolies idées de scénographie et de mise en scène, « Comment moi je » charme sans convaincre totalement en raison de son écriture décousue.
« Dis, qu’est-ce qu’il y a après la mort ? » « Avant moi est-ce que le monde existait déjà ? » « Pourquoi est-ce qu’on grandit ? » Hauts comme trois pommes, les enfants n’ont pas attendu de lire Spinoza ou Kant pour philosopher, quitte à nous mettre dans de délicates situations… Comment moi je aborde les grandes questions pour graines de philosophes au travers d’un petit récit sans chichis (mais parfois sans cohérence non plus).
À l’origine il y a un homme et une femme qui s’aiment très fort. Cette dernière, devenue maman, prend peur et abandonne son enfant au pied d’un grand arbre où un philosophe a, au sens propre, fait son nid. Et voici que l’enfant et l’ermite s’apprivoisent et apprennent ensemble. La pièce présente donc une histoire dont le terme clé est « grandir ». Mais le spectacle raconte aussi comment chacun se construit, car l’enfant part en quête de son identité jusqu’à trouver la récompense suprême d’un prénom et de la reconnaissance.
Ce conte-là est doux et joli même s’il est ajouré… comme la dentelle qui offre un chapiteau au spectateur. De fait, bien que l’on tricote au cours du spectacle, qu’un fil de pelote rouge parcourt la scène, on perd parfois le fil. Sans doute car la narration n’est en fait que le prétexte aux réflexions. Ce n’est pas qu’il n’y ait pas d’histoire, il y en a plutôt trop, mais elles sont souvent seulement esquissées. Les nains de Blanche-Neige et la petite Alice sont évoqués, mais trois petits tours et puis s’en vont. Pourtant, nous aimions bien ce prince Pinocchio qui promettait un amour éternel à sa dulcinée avec un nez démesurément allongé. Et toi, grand méchant loup, reviens ! Tu as à peine eu le temps de nous interroger sur nos peurs !
La scénographie vaudrait à elle seule le détour
Heureusement, il y a tout plein d’idées charmantes ! Une petite scène de théâtre d’objets nous invite, par exemple, à une guillerette fête d’anniversaire en compagnie de verres. Quand les artistes travaillent sur les ombres, ils créent des moments pudiques que la musique interprétée sur scène rend encore plus poétiques. Surtout la scénographie vaudrait à elle seule le détour. Rond de douceur évoquant la maternité, la scène est dominée par le ramage d’un grand arbre aux diverses merveilles. On pense au hêtre souverain d’Un roi sans divertissement (dans un contexte évidemment totalement différent), ou plus prosaïquement à l’arbre en plastique qui ouvrait son tronc dans ses jeux d’enfants. Chapeau à Dorothée Ruge (scénographie) comme à Julien Aillet qui a créé tant d’objets et de marionnettes attendrissants.
Le spectacle déverse donc de multiples trésors dans nos mains. Par ailleurs, nous sommes saisis par son prologue et son épilogue. Là, les qualités d’écriture sont patentes. Or, comme ces passages évoquent les parents, c’est un peu comme si le sujet qui inspirait vraiment les artistes était celui de la parentalité. On croirait presque que le bric-à-brac rencontré par l’enfant dans le ventre rond de la scène exprime le désordre que le personnage de la mère ressent dans le spectacle… Qui sait ? Il reste cependant bien sympathique. ¶
Laura Plas
Comment moi je, de Marie Levavasseur
Cie Tourneboulé • 81 bis, rue Gantois • 59000 Lille
03 59 51 32 60
Site : www.tourneboule.com
Courriel : cietourneboule@free.fr
Mise en scène : Marie Levavasseur
Avec : Rémy Chatton, Gaëlle Moquay et Gaëlle Fraysse (en alternance), Amélie Roman
Scénographie : Dorothée Ruge
Dramaturgie : Mariette Navarro
Philosophe-accompagnateur : Jean-Charles Pettier
Création lumière : Hervé Gary
Création musicale et sonore : Rémy Chatton
Marionnettes et objets : Julien Aillet
Costumes et accessoires : Morgane Dufour
Régisseur lumière : Martin Hennart ou Sylvain Liagre
Construction : Alexandre Herman
Photo : © Fabien Debrabandère
Présence Pasteur • 13, rue du Pont-Trouca • 84000 Avignon
Réservations : 04 32 74 18 54
Du 5 au 27 juillet 2014 à 10 h 15, relâche le 12 juillet
Durée : 55 minutes
12 € | 8 €
À partir de 4 ans
Reprise
Théâtre Jean‑Vilar • 155, rue de Bologne • Montpellier
04 67 40 41 39
Mercredi 8 mars 2017 à 15 heures, jeudi 9 mars à 14 h 30, vendredi 10 mars à 14 h 30 et 20 heures