« les Malices de Carmen », de Carol Robinson, Serge Teyssot‑Gay, Christophe Hauser, Laure Saint‑Hillier, les Quinconces, Le Mans

les Malices de Carmen © D.R.

Un son pas très parlant

Par Céline Doukhan
Les Trois Coups

Censée révéler quelques clés du système acoustique Carmen ®, cette création collective réserve de beaux moments mais laisse sur sa faim.

Au Mans, à part les 24 heures et les sempiternelles rillettes, on est à la pointe dans le domaine de l’acoustique. À tel point que cette année, c’est le laboratoire d’acoustique de l’université du Maine (L.A.U.M.) qui organise le Congrès français d’acoustique, réunissant 700 chercheurs de tout l’Hexagone du 11 au 15 avril 2016. Le grand public peut lui aussi prendre part à la fête à travers des conférences et animations, et ce concert un peu particulier dans la grande salle du théâtre des Quinconces.

En effet, le but de l’évènement est de mettre en avant les vertus de Carmen ®, système acoustique ultrasophistiqué pour salles de spectacle dont s’est équipé le théâtre des Quinconces dès sa construction, en 2014. Rien à voir, donc, avec la cigarière fatale de Bizet. Mais alors, rien du tout.

C’est que, musicalement, on est, dans un registre on ne peut plus contemporain, « entraîné dans un dédale sensoriel » ou encore dans « de multiples paysages sonores ». Seuls en scène, Serge Teyssot‑Gay et Carol Robinson se livrent à toutes sortes d’expérimentations à partir de leurs instruments respectifs : guitares et clarinettes. L’ancien membre de Noir Désir est depuis longtemps un adepte des recherches musicales auprès de complices metteurs en scène ou musiciens, comme Carol Robinson avec qui il crée depuis plusieurs années.

Cependant, le spectacle fut au départ conçu par Étienne Bultingaire, un ingénieur du son et musicien novateur qui avait œuvré avec des compositeurs, notamment au sein de l’Ircam. Or Bultingaire est décédé en pleine création, le 7 décembre dernier. Ce sont donc les artistes avec qui il avait travaillé qui ont repris le flambeau.

Le son dans tous ses états

Au fil des pièces musicales, chacun des deux musiciens rejoint ainsi ce qui semble être le cœur battant du dispositif : un ordinateur portable, posé sur une table d’où dégringolent moult câbles. Là, le duo met en branle toute une panoplie d’effets. C’est le son dans tous ses états : démultiplié, comme dans le premier morceau, ou bien comme en balade dans tout le volume de la salle.

Paradoxalement, c’est peut-être quand la musique est la plus simple que le son se fait plus émouvant, dans ces parties jouées à la seule guitare sèche, ou lorsque s’élève le son pur de la clarinette.

Aussi, sans remettre en question la compétence des musiciens, c’est la conception même du spectacle qui aurait sans doute pu être pensée dans un but plus pédagogique : après une heure et quart de sons en tout genre, certes souvent impressionnants, on n’a rien appris sur le fonctionnement de ce fameux système. Il aurait fallu pour cela assister à la table ronde suivant la représentation, avec les artistes mais aussi certains des inventeurs de Carmen ®. Et, nonobstant un titre engageant et sympathique, on ne peut pas dire que « malice » soit le mot qui vienne spontanément à l’esprit pour décrire le spectacle : pas un sourire ne traverse les visages des deux interprètes, et la création vidéo de Laure Saint‑Hillier, si elle apporte assurément une certaine poésie à la musique, reste plutôt abstraite. La fantaisie pointe le bout de son nez au début, quand Carol Robinson pousse comme des balançoires des baffles et un micro suspendus en l’air par des câbles et s’empare à la volée du micro pour prononcer des paroles hélas à peu près inintelligibles. Quant à Serge Teyssot‑Gay, imperturbable, tout de blanc vêtu, le crâne rasé, il offre une étonnante figure de bonze rock. Un jumeau inversé de Carmen, en quelque sorte. 

Céline Doukhan


les Malices de Carmen, de Carol Robinson, Serge Teyssot‑Gay, Christophe Hauser, Laure Saint‑Hillier

http://www.cstb.fr/actualites/detail/les-malices-de-carmen-theatre-des-quinconces-mans-130416/

Création collective de Carol Robinson, Serge Teyssot‑Gay, Christophe Hauser, Laure Saint‑Hillier dédiée à Étienne Bultingaire

Compositions et clarinettes : Carol Robinson

Guitares : Serge Teyssot‑Gay

Scénographie et vidéo : Laure Saint‑Hillier

Manipulations sonores : Christophe Hauser

Réalisation en informatique musicale : Carl Faia

Photo : © D.R.

Les Quinconces • place des Jacobins • 72000 Le Mans

www.quinconces-espal.com

Le 13 avril 2016 à 19 heures

Durée : 1 h 15

23 € | 14 € | 11 € | 9 € | 8 €

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