« Symphonie no 3, le Ponant », de Didier Squiban, Théâtre national de Bretagne à Rennes

Didier Squiban © S. Hervé

Un compositeur très applaudi

Par Jean‑François Picaut
Les Trois Coups

Un nouvel opus de Squiban, c’est toujours un évènement en Bretagne. Celui-ci était particulièrement attendu après les aperçus donnés lors du festival Grand Air (Rennes) de cet été.

Après sa première symphonie, Bretagne (juin 2000), commandée par la région Bretagne, et sa deuxième, Iroise (2004), commande de la ville de Brest, la troisième, le Ponant, est née du seul désir du pianiste Didier Squiban.

Sa nouvelle œuvre porte un nom qui, en évoquant le soleil couchant, suggère la terre de Bretagne chère au compositeur, ou plutôt la mer qui baigne les îles bretonnes. Le Ponant a été écrit pour orchestre symphonique et concertino, entendez par là un groupe de cinq musiciens : Alain Trévarin (accordéon), Bernard Le Dréau (saxophones), Sylvain Barou (flûtes), Jérôme Kerihuel (percussions) et Geoffroy Tamisier qui a réalisé l’orchestration (trompette). Pour la création mondiale, l’ensemble est placé sous la direction de Darrell Ang.

Cette nouvelle symphonie est construite en sept mouvements par référence aux archipels des Glénans, des Sept‑Îles et de Molène qui comptent chacun sept îles. Elle comporte quinze thèmes comme les quinze îles habitées du Ponant. Pour l’inspiration, Squiban revendique une thématique plus personnelle même s’il reconnaît l’influence des danses et des cantiques traditionnels ainsi que celle des Chansons d’orgueil de Per‑Jakez Hélias.

De la vie et des couleurs

Le concert de ce soir s’ouvrait par la Prison aérienne de Pierre‑Yves Moign (1927-mars 2013), orchestrateur des deux premières symphonies de Squiban, dont il fut aussi le professeur. C’est une pièce plutôt crépusculaire, l’auteur lui-même la qualifie de « chtonienne », aux couleurs très sombres illustrées notamment par les cors. On peut même la qualifier d’inquiétante avec les nombreuses dissonances des cordes et le timbre des percussions.

La musique reprend ensuite de la vie et des couleurs avec des extraits des symphonies Bretagne et Iroise. Bretagne, très mélodique, comporte d’abord une forme d’ampleur et de gravité avant de plonger dans la danse. L’accordéon lui apporte une coloration populaire tout comme la présence des tablas. Le final est très brillant. On retrouve une certaine parenté avec les extraits d’Iroise.

Mais tout le monde attend surtout la création. Squiban avait prévenu que le Ponant n’était pas une vraie symphonie, mais plutôt un poème symphonique ou mieux une suite. On n’y trouvera donc pas l’ampleur et les vastes ensembles qui caractérisent la symphonie, mais plutôt une suite de tableaux, voire de tableautins. Curieusement, ce morcellement du discours musical ne contribue guère à donner du mouvement à l’ensemble qui paraît plutôt statique, peut-être parce que le mode mineur y domine. On est un peu frustré aussi de ce que le compositeur, qui est pianiste, ne nous régale pas au moins d’un morceau de bravoure… Peut-être est-ce par modestie excessive.

Ces réserves faites, il faut reconnaître que le public ne boude pas son plaisir devant ce que Squiban sait faire mieux que tout autre : s’emparer d’une belle mélodie de cantique ancien ou d’un rythme de danse stimulant et le renouveler par le traitement orchestral et le contact avec d’autres traditions. C’est peut-être pour cela qu’il préfère se qualifier d’arrangeur plutôt que de compositeur. L’intervention du trompettiste de jazz Geoffroy Tamisier renforce la présence de ce genre également cher à Squiban. On le ressent dans quelques passages de cuivres de très belle venue.

On l’a dit, le public d’une salle Vilar archicomble s’est trouvé très satisfait dans l’ensemble. La direction dépouillée mais expressive et précise de Darrell Ang doit être saluée. Il faut aussi rendre hommage à l’Orchestre symphonique de Bretagne qui a pris l’ouvrage à bras le corps. Dans un concertino très engagé, nous distinguerons d’abord, outre Geoffroy Tamisier, le flûtiste et joueur de « pipe » Sylvain Barou puis le complice de toujours, Alain Trévarin. 

Jean-François Picaut


la Prison aérienne, de Pierre‑Yves Moign (1927‑2013)

Symphonie no 1, Bretagne (extraits), de Didier Squiban (1959-)

Symphonie no 2, Iroise (extraits), de Didier Squiban (1959-)

Symphonie no 3, le Ponant, de Didier Squiban (1959-)

Direction : Darrell Ang

Avec : Didier Squiban (piano), Geoffroy Tamisier (trompette et orchestration), Jérôme Kerihuel (percussions), Alain Trévarin (accordéon), Bernard Le Dréau (saxophone) et Sylvain Barou (pipe, flûtes)

Et l’Orchestre symphonique de Bretagne

Orchestre symphonique de Bretagne • 29, rue Saint‑Melaine • 35000 Rennes

Tél. 02 99 275 275

Site : http://o-s-b.fr/

Théâtre national de Bretagne • salle Vilar • 1, rue Saint‑Hélier • 35000 Rennes

Réservations : 02 99 31 12 31

www.t-n-b.fr

Le 20 décembre 2013 à 20 heures

Durée : 1 h 30

25 € | 11 € | 8 €

Photo : © S. Hervé

À propos de l'auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Du coup, vous aimerez aussi...

Pour en découvrir plus
Catégories

contact@lestroiscoups.fr

 © LES TROIS COUPS

Précédent
Suivant