« Valérian Renault en solo », l’Arrache‑cœur à Avignon

Valérian Renault © Catheine Cabrol

Valérian Renault : si tendre silex

Par Lise Facchin
Les Trois Coups

On l’a connu cabot dans les Vendeurs d’enclume. Le voici revenu en solo pour dispenser sa poésie mouvante, chantée de sombres gerçures en éclats d’éternel amoureux.

Une chose est sûre : avec cette voix à la matérialité trompeuse – caresse chaude, rassurante, et soudain éraflure –, l’homme pourrait chanter le Bottin. Ou dix pages de dictionnaire d’entomologie tout en parvenant à mouiller les cils de ses spectateurs. Alternance de notes fragiles, de rythmes cassés et de notes arrachées, splendides et blessées, la voix malmène l’auditoire avec un rien de sadisme. On passe sans s’en apercevoir du sourire attendri au spasme des entrailles serrées, d’une ronde volupté au tranchant de la lame d’un Roland furieux.

Ce qui ne gâte rien, sa plume grinçante a le charme d’un bois d’aubier : pris juste sous l’écorce, il en a la rudesse, mais son grain est celui qui touche le sensible. Quand Valérian chante « l’amour, c’est dégueulasse », qu’il passe au crible de sa dérision les poncifs du romantisme à la peau épaisse, ce n’est que pour chanter l’amour. Il se termine mal, oui, mais on y retourne… Il ne faudrait pas pour autant le croire tombé dans la case consensuelle du poète maudit, si torturé, et se vautrant dans un désespoir dont il ne se départirait pour rien au monde. Pudique et impudique, il est poète, oui, mais maudit certainement pas. Il y a bien trop de lumière dans tout cela.

Alors, oui, c’est un cynique. La liste est longue de ces vers acides, piquants, brillant parfois d’un givre narquois et brandissant l’insolence comme une vertu, qui font – c’est selon – rire à canines déployées ou dandiner de malaise sur les sièges grinçants. Provoc’ ? Certes, et même avec un plaisir gourmand, semble-t-il… Depuis qu’il poursuit sa route armé de sa seule guitare et non plus avec cet orchestre, pourtant superbe d’énergie, des Vendeurs d’enclume, les mots reprennent leurs droits et se prélassent en avant-scène, avec le plaisir d’un chat étirant ses pattes.

Il faut souhaiter que son style comme il y en a peu dans la chanson contemporaine, exigeant, rythmique en diable, inconfortable et toujours inattendu, ait une très, très longue vie. Nous en avons besoin au vu de la facilité dans laquelle se confit l’époque. Petit conseil en passant : soigner un peu les transitions, parfois bavardes. Concédons tout de même que se retrouver seul en scène, après une décennie d’orchestre, demande à coup sûr un réajustement dont on ne doute pas qu’il soit en cours. 

Lise Facchin


Valérian Renault en solo

Avec : Valérian Renault

L’Arrache-cœur • 13, rue du 58e-R.I. • 84000 Avignon

Réservations : 04 86 81 76 97

Site : www.valerianrenault.com

Du 5 au 27 juillet 2014 à 18 heures

Durée : 1 heure

Photo de Valérian Renault : © Catherine Cabrol

Tournée :

  • Le 21 septembre 2014 : Chant’apparts, La Roche-sur-Yon
  • Le 4 octobre 2014 : M.J.C., Vennelles
  • Le 11 octobre 2014 : Les Musicales de Bastia
  • Le 16 octobre 2014 : Festival de Marne, Ivry
  • Le 18 octobre 2014 : 6e son, Liévin
  • Le 4 novembre 2014 : Train Théâtre, Portes-lès-Valence
  • Le 8 novembre 2014 : Le Piémont d’Alaric
  • Le 22 novembre 2014 : Festival de travers, Théâtre d’Orléans

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