Au secours, Yannick, reviens !
Par Trina Mounier
Les Trois Coups
Si les prix attribués aux jeunes compagnies et jeunes auteurs débouchent souvent sur des réalisations prometteuses, il y a parfois loin de la coupe aux lèvres. Il est vrai que le Prix Célest’1 qui récompense des maquettes, c’est-à-dire des travaux non finalisés, prend des risques. C’est le cas du décevant « Richard sous les étoiles ».
Le pitch est inattendu : Richard hérite de son père la baraque à frites d’un coin désolé de province. Grâce à l’expérience acquise auprès de son paternel, il devient rapidement le meilleur fabricant de frites, mais tout aussi rapidement rêve d’autre chose (on s’évade difficilement de sa condition sociale CQFD).
Le projet donne ici une indication sur la portée sociologique de la pièce : ce qui reste de merveilleux dans ces villes de seconde zone peut être incarné par des objets bien prosaïques. Valérian Guillaume traite le sujet sans distance, à gros traits, plutôt méprisants pour un bas peuple aux appétits vulgaires. Peut-être est-ce du second degré ? On l’espère, mais rien n’est plus difficile que de faire rire les honnêtes gens ! Cette caricature, qui repose sur la répétition ad nauseam de réclamations, de déclarations d’amour aux… frites venant de fans frustrés (surtout frustrées, d’ailleurs), est affligeante.
L’art difficile de l’humour
Le jeu des comédiens ne fait pas non plus dans la dentelle : tout est outré, les voix à la limite de la dissonance, le jeu hystérisé, l’esthétique un condensé de clinquant. On pense au film de Quentin Dupieux, Yannick, ce jeune homme qui ose interrompre un spectacle de théâtre pour en dire tout le mal qu’il en pense. Faut-il le regretter ? Le public lyonnais est bien élevé, reste assis et applaudit mollement à cette prestation.
La deuxième partie prétend sauver l’affaire. Richard, habillé en cosmonaute, s’envole dans les étoiles pour retrouver les mots, ceux avec lesquels on fait de la littérature. Ils étaient déjà présents dans la première partie, en mode surtitrage. Cette fois, on assiste à une performance fort bien réalisée par Valérian Guillaume himself, mais qui déblatère à toute allure un texte incompréhensible, fait en grande partie d’onomatopées. L’auteur semble oublier que toute logorrhée n’est pas poésie. Ce monologue d’une dizaine de minutes est presque aussi indigeste que le reste. 🔴
Trina Mounier
Richard dans les étoiles, de Valérian Guillaume
Compagnie Désirades
Texte et mise en scène : Valérian Guillaume
Avec : Jules Benveniste, Raphaëlle Damilano, Giulia Dussolier, Lucie Gallo, Amandine Gay, Valérian Guillaume
Scénographie : James Brandily
Dramaturgie : Baudoin Woehl
Régie générale, son et vidéo : Margaux Robin
Musique : Victor Pavel
Création vidéo : Pierre Nouvel
Création lumière : Sylvain Séchet
Assistanat à la mise en scène : Mégane Arnaud
Costumes : Nathalie Saulnier
Durée : 1 h 20
Théâtre des Célestins • 4, rue Charles Dullin • 69002 Lyon
Du 27 septembre au 7 octobre 2023, du mardi au samedi à 20 h 30, dimanche à 16 h 30, relâche le lundi
Réservations : 04 72 77 40 00 ou en ligne
De 8 € à 26 €
Tournée :
• Les 24 et 25 novembre, Théâtre Sorano, à Toulouse
• Du 4 au 15 décembre, Théâtre de la Cité internationale, à Paris