João Paulo Dos Santos au sommet de son art !
Par Léna Martinelli
Les Trois Coups
Créé dans le cadre du Festival d’Avignon (Sujets à Vif – S.A.C.D.), « Contigo » poursuit sa route. Depuis 2006, cette forme courte, qui mêle cirque et danse contemporaine, tourne à travers le monde. Et pour cause : c’est remarquable ! Coup de cœur de la Route du Sirque 2017.
Seul en scène (et les toits de Nexon en arrière-plan de ce sublime Jardin des sens), un homme joue avec une chaise, une pierre, un bâton de pluie et le mât chinois qu’il pratique de haut en bas (et inversement). Ces objets incarnent chaque point de rencontres entre deux artistes : l’acrobate João Paulo Dos Santos et le chorégraphe Rui Horta, tous deux Portugais. De leurs différentes appréhensions du corps et d’espaces de mixité est né Contigo, une confrontation réussie de deux univers singuliers.
Entre rage et lâcher prise, ce spectacle montre surtout l’épuisement et la solitude de l’artiste face à l’exigence du cirque. Sur scène, cet homme qui chute beaucoup, se relève. Toujours. Et pour aller plus haut. Travailler encore et encore, répéter sans cesse, soutenir son effort, s’obstiner tout en laissant advenir : en somme le processus à l’œuvre dans la création. Pour autant, il ne s’agit pas de vouer un culte à la performance. On ne renonce à rien ici, et surtout pas au rêve, à l’inaccessible.
Entre ciel et terre
Dans Contigo (« avec toi », en portugais), João Paulo Dos Santos est plus que jamais en harmonie avec son agrès; le mât chinois ici remarquablement réinventé, entre grâce et puissance. D’ailleurs, cet artiste est reconnu comme un pionnier en la matière. Tout le travail sur l’environnement du mât (le rapport au sol grâce aux accessoires, les différents points d’appui, les expériences sur la gravité) mérite vraiment attention. Quant au corps à corps de l’acrobate avec l’obstacle que représente finalement son agrès, il suscite moult émotions. Cet affrontement – à moins qu’il ne s’agisse d’un duel amoureux – relève en effet d’une sensualité brute hors du commun.
Ces instantanés composent de véritables tableaux vivants, organiques et sensibles : tantôt cet écorché vif s’aggripe comme un forcené à sa vigie, tantôt il s’élève avec une agilité prodigieuse, mais sans garde-fou, pour accéder, enfin, à la plénitude. Cependant, est-ce bien là une source fructueuse pour l’inspiration artistique ? Le doute est décidément chevillé au corps.
Bien qu’emprunt d’une douce mélancolie, le spectacle est tout en retenue pudique. C’est justement sa force : l’économie de l’écriture stimule l’imaginaire. Ici, la friction entre hyperréalisme et les mythes laisse planer une abstraction poétique. Outre les mouvements, ce sont des images ou des sensations simples qui prédominent dans ce spectacle visuel et sonore. En noir et blanc, l’esthétique sert le propos de façon minimaliste. Aux sons métalliques et stridents du début, succède une musique résolument contemporaine, adaptée aux différents états d’âme, sans jamais être illustrative.
Assurément, Contigo touche avec subtilité à l’essentiel : l’ivresse du vertige et la puissance du rêve. ¶
Léna Martinelli
Contigo, de João Paulo Dos Santos et Rui Horta
Avec : João Paulo
Musique : Tiago Cerqueira et Victor Joaquim
Costumes : Pedro Dos Santos
Durée : 30 minutes
À partir de 4 ans
Photo : © Municipio de Montemor-o-Novo
Jardin des sens • 87800 Nexon
Dans le cadre de la Route du Sirque
Du 10 au 13 et du 18 au 19 août 2017
Tarif unique : 8 €
Réservations : 05 55 00 98 36