« La musique a besoin d’un public »
Par Jean-François Picaut
Les Trois Coups
L’Arfi, c’est l’Association pour la recherche d’un folklore imaginaire. Christian Rollet faisait partie de ses fondateurs en 1977. Aujourd’hui, il en fait toujours partie. Nous faisons avec lui un petit survol historique avant de nous intéresser à la nouvelle création du collectif.
Qui êtes-vous, Christian Rollet ?
Actuellement un des plus anciens musiciens de l’Arfi, batteur et percussionniste.
Pourquoi avez-vous décidé, en 1977, de participer à la création de l’Arfi ? Et pourquoi parlez-vous de « collectif » plutôt que de « troupe » ou « compagnie » ?
L’Arfi n’est pas la création, à partir de rien, d’individus inspirés et disparates, mais l’acte fondateur quasi politique à l’époque, réunissant des d’orchestres de même sensibilité esthétique, à Lyon, qui par consentement mutuel se sont regroupés sous un même sigle : Association pour la recherche, d’un folklore imaginaire
Pourquoi y êtes-vous encore ?
Parce que cette aventure a répondu au-delà de toutes mes attentes à mon appétit de créations, invention, formation, découvertes et confrontation productive sous la forme de disques, concerts, tournées, répertoires et aventures exaltantes. De plus, l’organisation autogérée de l’Arfi a permis à chacun de trouver des occasions de jouer, de gagner sa vie…
Qu’est-ce que la Marmite infernale ?
La Marmite infernale est le grand orchestre de l’Arfi. C’est le seul groupe qui est né de manière volontariste en incluant tous les musiciens des groupes qui avaient leur répertoire propre.
De ce fait, plusieurs compositeurs et arrangeurs de l’orchestre se mettent au service d’un son tout à fait particulier et souvent très énergique. Toutes les musiques jouées sont originales à l’exception de quelques hommages… (Berlioz, Xénakis…).
La formation, la culture et les histoires musicales de chacun font la diversité de ce qu’on retrouve dans cette marmite.
En 1997, la Marmite répond à l’appel d’une compagnie théâtrale pour l’accompagner dans un spectacle intitulé les Hommes. Cette année, dix‑neuf ans plus tard, c’est la Marmite qui invite le même metteur en scène, Jean‑Paul Delore, pour un concert mis en scène, les Hommes… maintenant ! : c’est parce que, selon vous, la musique ne se suffit pas à elle-même ?
Le rôle de la musique dans les sociétés et les cultures est par nature très divers. Des musiques inoubliables sont nées aussi bien de la musique savante, de rituels, de musiques de danse ou de divertissement.
Une fois qu’elle est créée, la musique ne se suffit pas à elle même, elle a besoin d’un public sinon elle manque son objet. Mais les incitations (même abusives !) qui ont été les déclencheurs de sa création sont infinies.
Étant sur scène, nous engageons tous les paramètres du spectacle !
Nous avons demandé à Jean‑Paul Delore qui connaît et suit les musiques de la Marmite infernale, d’en dégager une « moelle » dramatique et de la rendre visible. En apportant son éclairage, la forme s’est trouvée légèrement modifiée et – par effet dialectique – notre propre perception musicale ; il a fait du concert un objet plus subtil, plus visible et sans doute plus désirable pour le public.
En vingt ans, qu’est-ce qui a changé chez les hommes ?
Les hommes eux-mêmes, certains ont disparu ou nous ont quittés, d’autres sont arrivés avec des références nouvelles. Les musiques également qui évoluent avec notre temps et puis tout le reste du monde dans lequel nous nous inscrivons avec nos sensibilités, nos espoirs, nos énergies individuelles, nos convictions.
Que raconte votre nouveau spectacle ?
C’est un flux de compositions qui ne s’arrêtent pas, avec des suites, des inserts, des mouvements, avec quelques prises de parole sensibles qui rythment comme des confidences intimes l’intérieur des musiques. Les lumières et les costumes ajoutent à l’atmosphère à la fois étrange et familière d’une sorte de puissant rituel, humain et fraternel.
Comment qualifieriez-vous la musique des Hommes… maintenant ! ?
Généreuse, composée, improvisée, libre et sophistiquée et très jouissive, mais ce n’est pas une musique qui se danse. ¶
Propos recueillis par
Jean-François Picaut
les Hommes… maintenant !
Nouvelle création de la Marmite infernale
Mise en scène : Jean‑Paul Delore
Avec : Jean Aussanaire (saxophones alto et soprano), Jean‑Paul Autin (saxophone sopranino, flûtes), Michel Boiton (batterie, percussions), Jean Bolcato (contrebasse), Olivier Bost (trombone, guitare), Éric Brochard (basse électrique), Jean‑Marc François (jeu, cornet), Xavier Garcia (sampler, laptop, leap motion), Clément Gibert (clarinettes), Guillaume Grenard (trompette, trompette à coulisse, tuba, flûte traversière), Christian Rollet (batterie, percussions), Alfred Spirli (batterie, objets) et Guy Villerd (saxophone ténor, voix, électronique)
Son : Thierry Cousin
Création lumières : Franck Besson
Création costumes : Catherine Laval
Arfi • 16, rue Pizay • B.P. 1102 • 69202 Lyon cedex 01
Site : http://www.arfi.org/
Tél. 04 72 98 22 00
Prochaines dates :
- 11 février 2016 : le Fil – Saint-Étienne (42)
- 18 février 2016 : Carreau du temple – Paris
Photos : © Arfi