Un hommage drôle
et grotesque
Par Élise Ternat
Les Trois Coups
Comme à l’habitude aux Subsistances, c’est une salle comble qui accueille la compagnie du Zerep avec un « Gombrowiczshow » dynamique et décalé. Pour fêter les quarante ans de la mort d’un écrivain polonais d’exception, c’est un hommage haut en couleur que Xavier Boussiron et Sophie Perez nous ont ici concocté.
Tout d’abord, c’est un immense rideau que le public découvre. Sur celui-ci est dessiné un crâne posé sur une tarte aux pommes, et au-dessus on peut lire en lettres gothiques Gombrowiczshow. Car, oui, c’est un véritable show que la compagnie du Zerep propose ici. En effet, les cinq comédiens apparaissent de part et d’autre du rideau et propulsent le public dans un prologue en forme de cabaret, sur les airs jazzy d’une musique entraînante jouée en direct à la basse et au piano. Au programme des réjouissances, ce sont des hauts-de-forme, des queues-de-pie, des perruques et des paillettes qui annoncent la fête.
Puis le rideau s’ouvre sur une scène au décor composé d’un immense bloc de rochers. On assiste dans un premier moment à une scène triviale de repas d’époque. On rit beaucoup dans Grombrowiczshow, car dans cet univers rabelaisien, situations ridicules, absurdes et scabreuses s’enchaînent. Les procédés de mise en abyme côtoient les comiques de répétition et les cassures de rythme. L’hommage à l’auteur est complet. Plus qu’une allusion au roman les Envoûtés, la pièce est multiple et devient selon les situations une lecture, une opérette, une scène de foire… Rien n’échappe à ce spectacle, qui restitue et exacerbe la tonalité décalée et les thématiques de l’œuvre, au sens propre comme figuré. On pense ici à l’opulente silhouette d’une des comédiennes, qui illustre et donne matière à la question de la forme présente chez Gombrowicz.
Ainsi, nombreux sont les talents des comédiens, à commencer par celui de ne pas se prendre au sérieux. Parfaitement à l’aise, ils incarnent à merveille des personnages grotesques et bouffons. Plus généralement, les cinq acolytes excellent dans le maniement des styles, capables de passer d’une scène de gag à un véritable chant d’opéra.
De plus, il est aisé de remarquer la place faite aux costumes, perruques, paillettes, masques et postiches en tout genre. En grand nombre, ils passent d’un comédien à l’autre tout au long de la pièce créant ainsi de nouvelles situations, de nouveaux personnages. Ici, tout s’échange, tout se transforme : la robe de soirée laisse place au boudinant collant rouge puis à la tenue d’arlequin et la robe léopard est suivie du costume de caniche… Hétéroclite, l’imposant décor l’est aussi. Il se compose de massifs rocheux, d’une tête de clown géante, d’animaux empaillés, d’objets de toutes sortes ou encore d’un spectateur réquisitionné pour l’occasion.
Le jeu des lumières et la permanence de l’accompagnement musical participent à cette mise en scène grandiose. Aux coloris verdâtres succèdent des tonalités multicolores pour la scène d’opérette finale. Les éclairages laissent également apparaître au fil des scènes visages, individus, objets saugrenus… Dans les moments de suspense, la musique est là pour rappeler des scènes de genre. Parfois plus enjouée, elle contribue à donner à cet hommage des airs de fête.
Ainsi, force est de constater que beaucoup de moyens et de talents ont été mis en œuvre pour aboutir à un tel spectacle. Et que l’on adhère à Gombrowiczshow en riant à gorge déployée pendant plus d’une heure ou que l’on soit écœuré par cette dégoulinante profusion d’absurdité, cet hommage n’en demeure pas moins un objet terriblement distrayant qui ne peut laisser indifférent. ¶
Élise Ternat
Gombrowiczshow, de Sophie Perez et Xavier Boussiron
La compagnie du Zerep
Conception : Sophie Perez et Xavier Boussiron
Textes : Witold Gombrowicz, Sophie Perez, Xavier Boussiron
Avec : Sophie Lenoir, Stéphane Roger, Gilles-Gaston Dreyfus, Françoise Klein, Marlène Saldana
Scénographie : Sophie Perez, Xavier Boussiron
Costumes : Sophie Perez et Corinne Petitpierre
Musique : Xavier Boussiron
Images et régie générale : Laurent Friquet
Lumière : Fabrice Combier
Musiciens : Marie-Pierre Brebant, Xavier Boussiron
Régie lumière : Jérôme Delporte
Son : Sébastien Villeroy
Régie plateau : Anne Wagnet
Administration : Sophie Pulicani
Photo : © Laurent Friquet
Les Nouvelles Subsistances • 8 bis, quai Saint-Vincent • 69001 Lyon
Réservations : 04 78 39 10 02
Du 5 au 7 novembre 2008 à 20 heures
Durée : 1 h 30
12 € | 9 € | 6 €
Pass’ 2 spectacles 20 € | 16 €