Drôle, émouvante, généreuse
Par Jean-François Picaut
Les Trois Coups
Après avoir enregistré onze albums, Maurane reprend la route avec un programme qui combine son nouvel album et ses succès anciens. Un cocktail que le public a l’air d’apprécier.
Maurane est toute de noir vêtue (tunique et pantalon), mais le visage est radieux, sculpté par des éclairages travaillés. Le concert commence par deux morceaux clairement jazzy dont le magnifique Quand les sangs (Quand l’humain danse, Polydor, 2003). Son orchestre semble particulièrement à l’aise dans ce style : Louis Winsberg (guitares et direction musicale), Philippe Decock (clavier), Evert Verhees (basse) et Stéphane Huchard (batterie). Il le prouvera ensuite dans de nombreux titres dont Tu verras (Nougaro, 1978), Fais soleil (Toutes les mamas, 2001) où Stéphane Huchard signe un très beau solo de batterie, Paroles barbares (Toi du monde, Polydor, 2000) qui frappe par la modernité des paroles, etc.
Une large part est évidemment faite au nouvel album (Polydor / Universal, 2014) dont on entend d’abord Ouvre, son titre éponyme. Certains morceaux de ce disque évoquent la Maurane de Starmania par l’orchestration et surtout par le traitement de la voix. Ce ne sont pas ceux que je préfère, à l’exception de Trop forte, un texte où Maurane parle une nouvelle fois de ses formes généreuses avec beaucoup d’humour puisque le texte finit par dire : « Je suis vraiment trop forte / D’être arrivée jusqu’ici » !
L’humour, c’est à l’évidence une des grandes qualités de Maurane. Il est diffus dans nombre de ses chansons, mais il éclate dans tous les intermèdes où elle s’adresse au public.
Un nouvel auteur est né
On ne saurait non plus évoquer Maurane sans parler d’émotion. Attention, je n’ai pas dit sensiblerie. Elle oublie (paroles de Valérie Véga) en est une illustration éclatante. Maurane interprète cette chanson poignante, en hommage à Annie Girardot, avec beaucoup de gravité et de retenue. Son duo avec le piano, tout juste ponctué à la guitare, est un des sommets du concert.
Une des nouveautés de ce dernier album, c’est que Maurane n’hésite plus à chanter ses propres textes. Le disque en comporte cinq qui nous font regretter que la chanteuse ne nous les ait pas délivrés plus tôt. Un nouvel auteur est né. Je voudrais tout te dire ou Jamais seule, par exemple, en témoignent éloquemment dans ce concert.
La générosité de Maurane est proverbiale. Elle se confirme ici. Vingt et une chansons sont suivies de quatre rappels. Balancer donne lieu à une véritable joute avec Louis Winsberg, un régal. La Chanson de l’autruche, pleine d’humour, swingue à souhait. J’aime les dimanches quand il mouille, occasion d’un duo exceptionnel avec Winsberg à la guitare acoustique, ferait une conclusion très poétique. Mais c’est l’humour qui aura le dernier mot avec une sorte de pochade, un pot-pourri a cappella où Maurane et ses musiciens se répondent en de savoureux montages de phrases extraites de chansons célèbres du type « Lorsque j’entends… » (le public fredonne déjà : « ce prélude de Bach », mais les musiciens enchaînent avec « siffler le train » !). C’est donc avec le sourire que la foule ravie s’écoule lentement du Carré Sévigné plein comme un œuf. ¶
Jean-François Picaut
Ouvre, de Maurane
Avec : Maurane (chant), Louis Winsberg (guitares et direction musicale), Philippe Decock (clavier), Evert Verhees (basse) et Stéphane Huchard (batterie)
Photo de Maurane : © Courtoisie
Carré Sévigné • 4, mail de Bourgchevreuil • 35510 Cesson-Sévigné
Réservations : 02 99 83 11 00
Vendredi 25 septembre 2015 à 21 heures
Durée : 2 heures
30 € | 28 € | 20 €