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« la Tempête… », d’après « la Tempête » et « le Songe d’une nuit d’été », de Shakespeare, Nuits de Fourvière

la Tempête @ Loll Willems

Lavaudant emporte tout sur son passage

Par Élise Ternat
Les Trois Coups

Les premiers beaux jours de juin marquent le coup d’envoi de cette nouvelle édition de l’excellent festival Les Nuits de Fourvière. Au programme, cette année encore : théâtre, danse, cirque, musique, cinéma… pléthore de grands noms dans des domaines très éclectiques… avec pour commencer la dernière mise en scène de Georges Lavaudant, « la Tempête… », issue de deux œuvres de Shakespeare.

Georges Lavaudant n’en est pas à son premier coup d’essai. En effet, le Roi Lear, Roméo et Juliette, ou encore Richard III, pour ne citer qu’eux, comptent parmi les huit adaptations de Shakespeare que le metteur en scène a déjà pu offrir à son public. Le pari est ici un peu particulier puisqu’il est question de monter non simplement la Tempête, mais d’y adjoindre le Songe d’une nuit d’été. Soit plus d’une trentaine de personnages dans une double intrigue, le tout en plein air. Gonflé ? Certainement. Mais le pari est totalement réussi.

La scène débute par des éclairs, comme autant de coups de tonnerre surgissant du ciel : l’illusion est parfaite. On découvre alors le duc de Milan, Prospero, réfugié sur une île déserte avec à ses côtés sa fille Miranda. Il maîtrise par sa magie les éléments naturels et les esprits. À l’issue de la tempête provoquée par Ariel, esprit de l’air, et du naufrage du bateau du roi de Naples, Ferdinand, fils de ce dernier, échoue sur l’île. De là naît une idylle entre le jeune homme et Miranda… Survient alors un astucieux procédé de mise en abyme qui fait glisser, comme par magie, le spectateur du côté des nombreuses intrigues amoureuses de la seconde œuvre, le Songe d’une nuit d’été. Ici, Georges Lavaudant a choisi d’exacerber les analogies existant entre les deux pièces de Shakespeare afin de les mettre en écho. Au risque de perdre le spectateur en route, tant les couches du récit, devenu mille-feuilles, sont nombreuses.

La distribution d’acteurs est remarquable, comédiens confirmés et jeunes artistes excellent. Ils sont quinze sur scène pour une trentaine de rôles, autant de personnages fantasques, drôles, caricaturaux. Chacun des rôles a son double dans la seconde intrigue. Quant à l’exercice de la diction en plein air, c’est une vraie réussite, chacun sait se faire convaincant. On retiendra bien sûr la remarquable présence d’André Marcon dans les rôles de Prospero et Obéron.

Concernant la mise en scène en extérieur, on perçoit la parfaite maîtrise de l’exercice par Georges Lavaudant. En plus de magnifier l’amphithéâtre, les jeux de lumière ainsi que l’usage du son permettent de donner vie à l’espace scénique épuré. Un terre-plein central représente tantôt l’île de Prospero, tantôt le sol d’une forêt ; le mur du fond s’ouvre et se ferme au gré des entrées des comédiens. De même, le rythme impulsé à la pièce est dynamisé par des séquences musicales allant du thème du film Mulholland Drive de David Lynch à des morceaux de Nino Rota, en passant par Claude François. Quant aux costumes, ils renvoient à des genres plutôt diversifiés, le classique côtoie l’outrancier pour offrir un rendu tout à fait baroque. On pense notamment aux tenues des bouffons ou encore aux fées travesties.

Cette Tempête… dépoussière le genre et donne un timbre unique à deux classiques. Le ton est drôle, féerique, parfois métaphysique et décalé, tout en demeurant fidèle à l’intrigue des œuvres originales. Les deux heures et demie de spectacle se laissent consommer comme une friandise. Et le pari de faire de ces deux œuvres une adaptation de qualité qui évite l’écueil élitiste est totalement réussi. Une première soirée, donc, annonciatrice d’un festival des plus prometteurs. 

Élise Ternat


la Tempête…, d’après la Tempête et le Songe d’une nuit d’été, de William Shakespeare

Mise en scène : Georges Lavaudant

Traduction, adaptation : Daniel Loayza, Georges Lavaudant

Avec : Astrid Bas, Clément Bertani, François Caron, Olivier Cruveiller, Loïc‑Emmanuel Deneuvy, Jean‑François Lapalus, Manuel Le Lièvre, André Marcon, Pascal Rénéric, Jean‑Philippe Salério, Irina Solano, Janaïna Suaudeau, Marianne Téton, Julien Testard, Adeline Zarudiansky

Collaborateurs à la mise en scène : Jean‑Romain Vesperini, Moïse Touré

Assistante : Fani Carenco

Mouvements : Francis Viet

Décor et costumes : Jean‑Pierre Vergier

Assistante : Brigitte Triboullay

Lumières : Georges Lavaudant

Son : Luc Guillot

Maquillage : Sylvie Cailler

Régisseur général : Emmanuel Schunt

Photo : © Loll Willems

Une coproduction Les Nuits de Fourvière, M.C.93 Bobigny, LG Théâtre

Grand Théâtre • Les Nuits de Fourvière • 1, rue Cleberg • 69005 Lyon

Réservations : 04 72 32 00 00

www.nuitsdefourviere.fr

Vendredi 4, samedi 5, lundi 7 et mardi 8 juin 2010 à 22 heures

Durée : 2 h 30

25 € | 20 €

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