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L’Orchestre symphonique de Bretagne donnera en création mondiale à Quimper la nouvelle œuvre d’Ibrahim Maalouf, « Parachute »

Ibrahim Maalouf © Jean-François Picaut

Attention, ça décoiffe

Par Jean-François Picaut
Les Trois Coups

Au début mars, l’Orchestre symphonique de Bretagne donnera en création mondiale à Quimper la nouvelle œuvre d’Ibrahim Maalouf. Le compositeur et les responsables du projet présentaient récemment à Rennes ce qui sera une aventure peu ordinaire. « Les Trois Coups » étaient là pour vous.

Nous avons déjà évoqué ici le début de la résidence d’Ibrahim Maalouf à l’Orchestre symphonique de Bretagne et les circonstances de sa genèse. Cette résidence s’est poursuivie et approche de son terme après une durée exceptionnelle de deux ans, ce que souligne Marc Feldman, l’administrateur général de l’orchestre. Il rappelle qu’il est « très rare qu’un compositeur accepte un tel travail avec un orchestre avant la phase d’écriture ». Ibrahim Maalouf insiste, lui, sur la « chance inouïe » que ces deux années ont représenté pour lui. Il en a profité pour « acquérir une connaissance précise de l’orchestre, mais aussi de chacun de ses musiciens », s’intéressant à leur personnalité musicale, afin de composer sur mesure, en quelque sorte.

N’allez pas croire, pour autant, que la nouvelle œuvre, qui s’appellera Parachute, sera pour les instrumentistes une promenade de santé. Bien au contraire, le compositeur entend bien mettre à profit ce qu’il aura appris pour entraîner ses musiciens hors des sentiers battus. Il leur propose un vrai défi pour un orchestre symphonique : improviser. Le grand mot est lâché, car ce qui constitue le pain quotidien des jazzmen, entre autres, est une véritable aventure pour la plupart des musiciens classiques.

« Une mission difficile mais très excitante »

Le sens de Parachute s’éclaire peu à peu. Ibrahim Maalouf explique qu’il a vu les trois parties de ce qui sera sa première symphonie comme les trois phases d’un saut en parachute. La première, quand on se lance dans le vide jusqu’à l’ouverture du parachute, et la dernière, l’atterrissage, ne sont pas sans péril, mais la partie centrale, le vol, est censée être plaisante. Il en sera de même dans Parachute. Le mouvement principal, le plus long, sera écrit même s’il affectera la forme d’une improvisation. Les musiciens y seront en terrain connu. Le premier et le dernier seront largement improvisés, chacun devra donc prendre des risques. Une large constituante du travail de l’orchestre désormais est d’apprivoiser cette démarche nouvelle à bien des égards. Quand on lui demande si c’est une tâche malaisée, Ibrahim Maalouf répond en souriant : « C’est une mission difficile mais très excitante ». Pour avoir assisté à l’une des séances, nous ne pouvons qu’acquiescer.

Reste que le spectateur, lui, peut s’interroger sur le résultat final de ce qu’il verra et entendra. Il aura lui aussi son « parachute », la fameuse trompette à quarts de ton. Le compositeur confirme que c’est son instrument qui aura à « donner un sens » et, dit-il, « comme ma trompette a maintenant l’habitude de se prêter à ce type d’exercice, elle nous aidera à bâtir l’homogénéité de l’œuvre ». Et il poursuit par l’affirmation d’un authentique manifeste : « Ma conviction est que nous sommes tous capables de nourrir un propos artistique, qu’on soit mélomane ou pas, mais a fortiori si on est musicien ! Que l’on vienne ou non des musiques improvisées, du jazz, des musiques dites actuelles, ethniques ou même de la musique classique, nous sommes tous en mesure d’exprimer à travers notre bagage culturel et selon notre niveau technique de musicien, un certain nombre de sentiments et d’émotions. Ces sensations auditives et visuelles improvisées ont tout à fait leur place en concert, pour ceux qui, attentionnés et bienveillants, tentent d’en déceler l’intérêt. ».

À noter que le concert constituera un véritable tour du monde musical. En effet, le programme s’ouvrira sur une pièce baroque de Rameau, inspirée d’un Orient aussi lointain que fantasmé, se poursuivra dans l’atmosphère du carnaval de Rio mis en musique par le voyageur Darius Milhaud, puis fera escale dans la Chine du compositeur Tan Dun, avant de s’achever sur la création d’Ibrahim Maalouf…

Une innovation financière

Avec Parachute, une œuvre originale, inédite, qui entraîne la musique symphonique hors des sentiers battus, l’Orchestre symphonique de Bretagne et Ibrahim Maalouf s’engagent pour la création, pour que les productions d’aujourd’hui deviennent les classiques de demain, et participent ainsi à l’enrichissement du patrimoine musical. Ils contribuent aussi au partage de la musique vivante, par tous, partout, puisque l’O.S.B. et le trompettiste emmèneront Parachute aux quatre coins de la Bretagne, pour des concerts, des rencontres avec le public, une conférence-concert. Paris ne sera pas oublié et accueillera l’œuvre dans le cadre d’Orchestres en fête.

Un projet d’une telle ambition nécessite un engagement pécuniaire important. C’est pourquoi l’orchestre et son mécène fondateur, la Banque populaire de l’Ouest, se lancent dans l’innovation économique. L’O.S.B., explique Marc Feldman, « propose à son public de devenir mécène de Parachute, via une campagne de financement participatif sur le site Ulule.com (http://fr.ulule.com/ibrahim-maalouf/). Chacun pourra contribuer à l’opération à partir de cinq euros. Les donateurs particuliers bénéficieront d’une réduction d’impôts de 66 % du montant du don et de contreparties exceptionnelles. Les sommes récoltées (objectif de 3 000 € sur un budget total de 30 000 €) permettront de financer la création de l’œuvre au long d’une tournée de neuf dates, mais concourront aussi à la mise en place d’actions pédagogiques avec des écoles de la région : rencontres, master class… De son côté, Léonie Zago précise l’engagement de sa banque : « Pour accompagner le financement participatif, nous avons mis en place le mécanisme “doublons la mise”. Chaque euro versé par un particulier sera doublé d’un euro versé par la Banque populaire de l’Ouest. Mécène fondateur depuis 1989, notre banque poursuit une double mission auprès de l’O.S.B. : le soutenir pour ouvrir le moment du concert au plus grand nombre et l’aider à développer de nouvelles ressources financières au profit de la création culturelle. Un enjeu majeur à l’heure où le paysage culturel est en pleine mutation. ».

Tout cela est très alléchant. On sait déjà que le public se presse pour la réservation. Encore un peu de patience, et chacun pourra juger par lui-même le succès de cette entreprise marquée au coin du renouveau. 

Jean-François Picaut


Parachute, d’Ibrahim Maalouf

Avec l’Orchestre symphonique de Bretagne (direction Darrell Ang)

Administrateur général de l’orchestre : Marc Feldman

Vendredi 6 mars 2015 à 20 heures : Théâtre de Cornouaille, scène nationale, Quimper (création mondiale)

Samedi 7 mars 2015 à 20 h 30 : Ploërmel, centre culturel

Lundi 9 mars 2015 à 20 heures : Théâtre national de Bretagne, Rennes

Mardi 10 mars 2015 à 20 heures : Théâtre national de Bretagne, Rennes

Jeudi 12 mars 2015 à 20 h 30 : La Passerelle, scène nationale, Saint-Brieuc

Vendredi 13 mars 2015 à 20 h 30 : Théâtre Anne-de-Bretagne, Vannes

Dimanche 15 mars 2015 à 18 heures : L’Arcadie, Ploudalmézeau

Samedi 28 mars 2015 à 19 heures : Philharmonie, Paris (dans le cadre d’Orchestres en fête)

Orchestre symphonique de Bretagne • 42 A, rue Saint-Melaine • B.P. 30823 • 35108 Rennes cedex 3

02 99 275 276

Site : http://www.orchestre-de-bretagne.com/-Francais-

Photo : © Jean-François Picaut

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