« Barons perchés », de Mathurin Bolze, Festival Utopistes, cour du lycée Saint‑Just à Lyon

« Barons perchés » © Christophe Raynaud de Lage

Et si on se moquait de la pesanteur ?

Par Trina Mounier
Les Trois Coups

Dans le cadre du Festival Utopistes qu’il organise à Lyon, Mathurin Bolze a choisi de reprendre un spectacle déjà ancien, mais qui avait attiré l’attention lors de sa création, « Barons perchés ». Un duo renversant !

Le titre s’inspire d’un roman d’Italo Calvino dont le héros décidait de grimper dans un arbre et de ne plus jamais en redescendre. Ici, ils sont deux, deux acrobates, deux danseurs, Mathurin Bolze et Karim Messaoudi, deux barons perchés. À moins qu’ils ne soient qu’un, finalement, tant leur ressemblance est frappante, leurs mouvements synchrones. L’un est-il le double de l’autre ? son jumeau ? son ombre ? ou encore son reflet inversé dans le miroir ? Car si la plupart du temps ils évoluent de manière absolument parallèle, à d’autres moments l’un rentre par la fenêtre quand l’autre sort par la porte ou bien l’un marche normalement tandis que l’autre utilise une verticale inverse, seuls les pieds (ou la tête ou une main) se touchant, troublants siamois…

Dans un cube de bric et de broc, une cabane dans les arbres du style de celle dont nous rêvions enfants et qu’habitait le héros de Calvino, endroit inaccessible, repère, nid, cachette, Mathurin Bolze et Karim Messaoudi jouent. Au sol, il n’y a pas de sol… mais un immense trampoline qui autorise tous les envols, tous les pieds de nez à la pesanteur. Et c’est peu dire qu’ils en font. Leur dextérité, leurs prouesses sont éblouissantes, même si elles ne recherchent pas la sidération de regards non avertis. Leurs mouvements défient l’attraction terrestre, leur passage à l’immobilité soudaine fascine, mais nul roulement de tambour, nul faisceau de lumière pour le souligner. Ces deux‑là avancent masqués, ne se donnent qu’avec circonspection, exigent beaucoup de leur public en refusant tout recours à la démagogie ou au spectaculaire. Cette étonnante et apparente facilité avec laquelle ils marchent sur un mur vertical, corps à l’exacte diagonale, ou s’accrochent au mur, jonglent avec leur corps, le corps de l’autre, s’impose comme leur marque de fabrique.

Les images pleuvent, nuée d’oiseaux évidemment, ou voiles qui s’affalent, et certaines évoquent même la grande Pina Bausch…

Il existe une telle élégance dans ce qu’ils disent ainsi du rapport à l’espace, de la passion de la liberté qui émane de chacun de leurs gestes qu’on en est médusé, un peu hypnotisé aussi. Il faut également saluer ces moments d’insondable poésie qui vous prennent quand le spectacle s’étire… parfois juste un petit peu trop ou lorsqu’ils relâchent leur corps épuisé, dans un abandon total et touchant. 

Trina Mounier


Barons perchés, de Mathurin Bolze

Avec : Mathurin Bolze et Karim Messaoudi

Création sonore : Jérôme Fèvre

Dispositif lumières : Christian Dubet

Création lumière : Jérémie Cusenier

Scénographie : Goury

Régie son : Frédéric Marolleau

Régie plateau / lumière : Nicolas Julliand

Coordination artistique : Marion Floras

Photos : © Christophe Raynaud de Lage

www.festival-utopistes.fr

www.nuitsdefourviere.com

Cour du lycée Saint‑Just, Lyon 5e

Les 9 et 10 juin 2016 à 22 heures

Durée : 1 heure

De 9 € à 17 €

Prochaines représentations 

  • 31 janvier 2017, 1er et 2 février 2017 : Théâtre de l’Archipel à Perpignan
  • 10 février 2017 : le Togoggan à Décines
  • 28 février, 1er mars 2017 : Théâtre des Louvrais à Pontoise
  • 5 mars 2017 : espace Marcel‑Carné à Saint‑Michel-sur‑Orge
  • 10 mars 2017 : Théâtre Théo‑Argence à Saint‑Priest
  • 30 mars 2017 : Circa pôle national des arts du cirque à Auch

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