Céleste, mais pas au septième ciel
Par Laura Plas
Les Trois Coups
Lestée par un texte pataud, la nouvelle création jeune public de Didier Ruiz « Céleste, ma planète » ne parvient pas à décoller, en dépit d’une scénographie intéressante et d’acteurs globalement convaincants.
A priori, le spectacle avait tout pour plaire : un auteur jeunesse à succès, un metteur en scène chevronné, un propos écologique et une fin pleine d’espoir. Et, de fait, on trouve bien tous ces ingrédients dans Céleste, ma planète. On pourrait même y ajouter une histoire d’amour, une peinture des villes tentaculaires, une radioscopie de famille dysfonctionnelle, une amitié indéfectible, des courses poursuites.
Mais justement, tout cela fait un peu machine à succès jeunesse. Par ailleurs, comme le texte pâtit d’une certaine boursoufflure lyrique (« Et que je t’entasse les métaphores ! »), l’intrigue est elle-même surchargée. Quant au happy end, contre lequel on n’a rien à dire en soi, il arrive comme un miracle de dernière minute, version contemporaine des mauvais deus ex machina d’antan. Ajoutons que la pléthore d’évènements qui encombrent l’intrigue n’empêche pas un retard à l’allumage. Les dix premières minutes du spectacle posent certes la situation initiale, mais on n’en voit pas vraiment l’intérêt pour l’intrigue principale. Dommage que Didier Ruiz n’ait pas coupé certains passages pour son adaptation.
Quand on arrive en ville… grâce à la vidéo
Restent quelques atouts non négligeables. D’abord, l’engagement des acteurs. Si Delphine Lacheteau, qui prête ses jolis traits à Céleste, manque parfois de présence, on peut l’expliquer par son rôle de jeune première effacée par la maladie. Et puis ses deux comparses compensent bien. Mathieu Dion se démultiplie pour jouer de nombreux rôles. Il est particulièrement convaincant dans les incarnations satiriques, les travestissements loufoques. Hugues de La Salle lui, porte la narration avec beaucoup d’énergie. Il compose un personnage candide et attachant auquel les enfants d’aujourd’hui pourraient s’identifier. Enfin, tous trois poussent bien la chansonnette.
L’amour pour faire décoller la cause écologique ?
La scénographie du spectacle nous fait, quant à elle, pénétrer en dystopie, dans un monde graphiquement cohérent. Les teintes violettes, le tracé BD, les métamorphoses de la projection sont bien conçus. Les surfaces des projections elles-mêmes varient selon les moments. On imagine ainsi bien cette Intensity aux tours immenses et enfumées par la pollution où les parents emplissent des frigos connectés pour gaver leur progéniture, plutôt que d’être à leurs côtés.
Réflexion sur la Babel humaine qui conduit à la destruction de l’écosystème, la pièce interroge la verticalité par ses métaphores, ses lieux, son histoire, mais elle ne fait donc pas vraiment décoller. Espérons qu’au moins, à l’atterrissage, au sortir de la salle, parents et enfants prendront le relais de la fiction pour tenter de sauver notre planète terrestre. 🔴
Laura Plas
Céleste, ma planète, de Timothée de Fombelle
Le texte est édité chez Gallimard Jeunesse
Site de la compagnie
Mise en scène et adaptation : Didier Ruiz
Dramaturgie : Olivia Burton
Avec : Delphine Lacheteau, Hugues de La Salle et Mathieu Dion
Scénographie : Emmanuelle Debeusscher
Vidéo : Zita Cochet
Image animée : Lucien Aschehoug et Aurore Fénié
Durée : 1 heure
Dès 9 ans
Théâtre Dunois, scène pour la jeunesse • 7, rue Louise Weiss • 75013 Paris
Du 8 au 22 décembre 2022, les samedis à 18 heures, les dimanches à 16 heures, les mercredis à 15 heures (et à 19 heures le 21), le 22 à 19 heures
De 8 € à 16 €
Réservations : 01 45 84 72 00 ou en ligne
Tournée 2023 ici :
• Le 13 janvier, Théâtre de Chevilly-Larue (91)
• Les 21, 22 et 24 avril, au Maif Social Club, à Paris (75003)
• Les 21, 22 et 24 avril au Théâtre Traversière, à Paris(75012)
À découvrir sur Les Trois Coups :
☛ Trans, de Didier Ruiz, au gymnase du Lycée Mistral, à Avignon, par Lorène de Bonnay