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Entretien avec Lucie Hennebert, autrice et metteuse en scène, à propos de « Sortir de la nuit »

« Personne ne veut voir la misère qui revient au galop »

Par Léna Martinelli
Les Trois Coups

Lucie Hennebert, lauréate de la SACD, présente sa première pièce, « Sortir de la nuit », un texte qui a bénéficié de l’aide à l’écriture de l’association Beaumarchais SACD.

De quoi parle votre pièce ?

Dans la ville de Farvale, on a retrouvé mort le petit fils du gouverneur. Et depuis qu’on a trouvé le cadavre de cet enfant, il n’y a plus d’eau dans la ville. Plus une goutte. Personne ne sait pourquoi. On dit que c’est le nouveau siècle qui boit les larmes de l’ancien. La réalité est bien moins poétique : personne ne veut voir la misère qui revient au galop. Pourtant la misère, elle est là…

On pense à une tragédie. L’intrigue se déroule-t-elle de nos jours ?

Absolument ! Tout se passe de nos jours, même si formellement, la pièce suit un modèle classique : elle est écrite en cinq actes, la majorité des phrases suivent des rythmes pairs, elle a un côté shakespearien par ses personnages, sa dramaturgie, le mélange du tragique et du grotesque. Mais je me suis autorisée beaucoup de libertés au sein de chaque acte : d’improbables lieux, différents registres, de la castagne et des punchlines, une scène muette, un chœur en vers libres, un dernier acte en une seule scène…

© Rémi Poureyron

En quoi réside sa modernité ?

Dans le style et le propos. La pièce se demande comment résoudre une crise écologique majeure dans une ville où les décisionnaires sont frappés de plein fouet par le deuil. Le politique et le social y sont abordés à travers des questions quotidiennes, humaines. Qu’implique le pouvoir ? Contre qui et contre quoi se révolte-t-on ? D’où vient la violence ? Qu’est-ce que veut dire « une femme forte » ?

Une ville qui ne peut plus boire d’eau

est une ville prête à boire du sang

Vous êtes-vous inspirée du climat actuel ?

Écrite fin 2019, sur fonds de tensions sociales et juste avant le confinement, la pièce traite en effet de thèmes qui résonnent fort avec la crise sanitaire : pandémie, pénurie, paralysie du pouvoir, problèmes écologiques et sociaux…

© Rémi Poureyron

Une première pièce repérée par la SACD en 2020, un spectacle monté dans la foulée, déjà des premières dates de représentation… Des fées se seraient-elle penchées sur votre berceau ?

Il est vrai que la bourse à l’écriture de la fondation Beaumarchais SACD nous a tous stimulés. Sur 470 textes, douze ont été sélectionnés, dont le mien. Cette bourse a permis de monter le spectacle avec d’anciens camarades du Conservatoire du XIXe arrondissement, par où je suis passée, et d’autres qui nous ont rejoints. Nous avons créé la Compagnie des nuits. On m’a poussée à endosser le rôle de metteuse en scène mais j’ai été fabuleusement accompagnée. Même si j’ai quelques idées de direction, je fais en sorte de créer un climat de travail où chacune et chacun se sentent libres de prendre la parole, de donner leur vision de la pièce et des personnages.

Après plusieurs mois de répétitions, alors que plusieurs d’entre nous étions dans les théâtres occupés, pendant les confinements, nous avons été sélectionnés par le Théâtre du Soleil, pour participer au « Soleil se partage », à savoir la possibilité, pour de jeunes troupes, de jouer sur les pelouses du théâtre, en mai dernier. Un festival inédit et un précieux coup de pouce !

Comment le spectacle a-t-il été reçu ?

Beaucoup de retours positifs. Quelle chance d’avoir pu jouer devant du public, juste avant la fin du confinement ! Le théâtre revivait enfin. Cela a été possible parce que c’était en extérieur. D’ailleurs ce fut un défi car nous avons joué en plein jour, bien que la pièce se déroule entre la tombée de la nuit et le lever du soleil. Le final sous la pluie fut inoubliable. Les premières gouttes sont tombées lors de la dernière scène, alors qu’un des personnages venait de dire « Je sais comment ramener l’eau, je peux vous expliquer » !

© Rémo Poureyron

Un signe encourageant, surtout que vous continuez sur votre lancée !

Le Centre Nouvelle Athènes a décidé de nous aider en nous permettant de montrer le spectacle au Lustre. Depuis, le spectacle a bien évolué avec, entre autres, une création lumière. Nous espérons la venue de professionnels pour diffuser le spectacle.

De plus, j’ai eu la possibilité de proposer une soirée spéciale à la Maison des auteurs de la SACD. Le 20 septembre, les membres de la compagnie liront et joueront des extraits de Sortir de la nuit en musique, puis nous ouvrirons le bar. On pourra se faire servir à boire par les interprètes, lesquels continueront à dire des textes à qui voudra bien les entendre (ces textes seront tirés d’autres de mes écrits : roman, nouvelles, poèmes). D’où le nom de cette soirée : Cabaret poétique

Propos recueillis par
Léna Martinelli


Sortir de la nuit, de Lucie Hennebert

La Compagnie des nuits

Page Facebook de la compagnie ici et compte Instagram ici

Texte et mise en scène : Lucie Hennebert

Avec : Lou Justine Moua Nédellec, Aurélien Gerhards, Lucas de Oliveira, Louis Rostain, Rémi Poureyron, Barthélémy Héran, Tom Savonet, Gibriel Lakhdari, Margot Barnaud

Création lumières : Amir Amini

Le Lustre • Centre Nouvelle Athènes • 14-18, rue de la Tour-des-Dames • 75009 Paris

Le 1er octobre , à 19 heures et le 2 octobre, à 15 h 30

Cabaret poétique à la SACD

Maison des Auteurs de la SACD • 7, rue Ballu • 75009 Paris

Le 20 septembre 2021, à 19 heures

Entrée en accès libre sur réservation

Un pass sanitaire sera demandé à l’entrée

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