« El compas que nos une », Neuvièmes Rencontras flamencas de Rennes

« Macarena de la ripa » © André Bougot

La flamme andalouse

Par Jean-François Picaut
Les Trois Coups

Pour leur neuvième édition, les Rencontras flamencas de Rennes, du 5 au 13 février 2015, ont vu les choses en grand et mobilisé de nombreux partenaires : Apsâra flamenco, l’association à l’origine de l’évènement, l’Opéra de Rennes, le centre culturel de Cesson-Sévigné (Ille-et-Vilaine) et le conservatoire à rayonnement régional de Rennes.

Depuis 2007, sous l’impulsion de Cécile Apsâra (danseuse, chorégraphe) et de l’association Apsâra flamenco, les Rencontras flamencas, avec le soutien de la ville de Rennes, proposent plusieurs jours de partage intensif autour du flamenco. Nous avons retenu trois grands moments de l’édition 2015, unis sous l’appellation el Compas que nos une : une conférence sur l’histoire du flamenco, le concert d’Inés Bacán à l’Opéra et la peña finale. Mais les rencontres, ce sont aussi des stages et des master class.

Un spectacle-conférence d’une qualité exceptionnelle

Myriam Rambagh (artiste multimédia), Anne‑Marie Virelizier (conférencière) et Cécile Apsâra (danseuse et chorégraphe) ont uni leurs talents pour présenter aux Champs libres (Rennes), le 11 février, ce spectacle-conférence d’une qualité exceptionnelle. C’est une alliance particulièrement réussie d’une voix off, de l’image, de la musique et de la danse qui permet de se faire une idée de l’histoire du flamenco, au-delà des légendes tenaces. Il faut rendre un hommage tout spécial à la mise en lumière qui magnifie la danse élégante et passionnée de Cécile Apsâra et donne parfois des ombres chinoises de toute beauté.

La gravité flamenca

De son côté, l’Opéra de Rennes accueillait, le 12 février, la grande chanteuse Inés Bacán, dans le cadre de son cycle Divas du monde. C’est d’ailleurs cette invitation qui a été le pivot des Rencontras flamencas de cette année. Inés est la sœur du regretté guitariste Pedro Bacán et l’arrière-petite-fille du légendaire Pinini. C’est dire si elle est une héritière de la tradition. Elle est, ce soir, entourée de son frère Juan, qui jusque-là n’avait jamais chanté qu’en aficionado, des chanteurs El Maera et El Galli ainsi que des danseurs Macarena de la Ripa et Manolito Pelusa. Antonio Gamez et Enrique Rodriguez tiennent les guitares. Kike Martin, autre aficionado, complète le groupe pour le jaleo (encouragements divers) et les palmas (claquements de main qui marquent le rythme).

Le concert de ce soir, si ce n’est dans les rappels où chacun semble libéré au point que certains échangent leurs rôles, ne s’inscrit pas dans la tradition de la fête andalouse. Est-ce l’influence des ors de l’Opéra ? Comme le chant d’Inés Bacán, il incarne plutôt la gravité flamenca. La diva extériorise toute la douleur des complaintes avec des accents qui savent toucher. Il s’y ajoute une grande expressivité du visage et des mains. À l’inverse, son frère Juan, qui utilise le même registre, paraît enfermé dans son monde, sans souci de communiquer.

Les chanteurs qui accompagnent les danseurs, conformément à l’esthétique du flamenco, se placent aux antipodes du « beau chant » au sens traditionnel. C’est particulièrement vrai pour El Galli, dont la voix est toujours au bord de la rupture et qui chante la rage, la colère, le désespoir en se situant à la limite du cri. Son compère El Maera s’inscrit, lui, dans une tessiture plus posée, sans que cela n’altère le côté déchirant de son interprétation.

Macarena de la Ripa et Manolito Pelusa assurent l’aspect plus spectaculaire du concert. L’une et l’autre sont deux immenses danseurs dotés d’une technique éblouissante. On regrettera le caractère un peu froid de leur prestation. Ce n’est pas le cas du grand Antonio Gamez à la guitare. Qu’il accompagne les danseurs, Inés Bacán ou joue seul, on sent que la musique le fait vibrer, et il n’hésite pas à participer au jaleo.

La fête enfin

La clôture de ce temps fort du flamenco en Bretagne a lieu au Carré Sévigné à Cesson-Sévigné (Ille-et-Vilaine), le 13 février. C’est la peña flamenca, une soirée organisée dans l’esprit des fêtes andalouses, qui réunissent artistes, aficionados et spectateurs : un moment festif de rencontre et de partage. Les peñas sont l’occasion d’une transmission privilégiée du flamenco. Le public a répondu présent et cette soirée a été donnée à guichets fermés.

Après la restitution de leurs stages par les élèves de Manolito Pelusa (danse), accompagnés à la guitare par Antonio Gamez, les spectateurs de l’Opéra ont été surpris d’assister une seconde fois à une partie du concert de la veille. Ils n’ont cependant pas eu à s’en plaindre, car la fête, enfin, était là. Manolito Pelusa et surtout Macarena de la Ripa se sont libérés et ont été véritablement éblouissants. Il n’est guère que Juan Bacán qui soit resté sur sa réserve.

Après un court entracte permettant de dégager un plateau de danse pour les amateurs, le bal flamenco a démarré. Entraîné par la fougue de Cécile Apsâra et du groupe amateur d’Apsâra flamenco, Y de noche, chacun a pu s’essayer aux rythmes des sevillanas ou de sonorités flamencas plus inspirées des musiques actuelles.

C’est dans cette atmosphère de liesse populaire que se sont conclues les neuvièmes Rencontras flamencas, les plus ambitieuses à ce jour. Cela ne devrait pas manquer d’insuffler un dynamisme supplémentaire aux prochaines éditions. 

Jean-François Picaut


El compas que nos une

Neuvièmes Rencontras flamencas de Rennes

Du 5 au 13 février 2015

Compagnie Apsâra flamenco • 22, rue de Bellevue • 35700 Rennes

02 99 53 18 83

Site : www. http://apsaraflamenco.fr

Courriel : apsara.flamenco@free.fr

Photos : Macarena de la Ripa | © André Bougot

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