« Guignol, le Spectacle », Sorel, Anthony Michineau, Ned Grujic, théâtre de la Gaité Montparnasse, Paris

Guignol-le-Spectacle-Sorel © Philippe Frétault.jpg

Un amour de Guignol

Par Florence Douroux
Les Trois Coups

Plus de 200 ans après sa création, la marionnette Guignol prend vie en chair et en os. Dans un spectacle musical haut en couleur, Guignol et ses amis s’incarnent. Chansons, chorégraphies, claquettes : un tourbillon de vie dans une ambiance pop, orchestrée avec poésie et virtuosité. À voir par toute la famille au théâtre de la Gaité Montparnasse.

À Lyondres (ville imaginaire située entre Lyon et Londres), Monsieur Henry dirige un théâtre de marionnettes où il présente les aventures de Guignol, Madelon et Gnafron. Mais il s’endette et doit affronter la méchante Betty qui menace de construire un supermarché à la place du castelet. Bien décidées à sauver le théâtre, les trois marionnettes décident de partir à la recherche de la « Belle étoile », diamant magique permettant la réalisation d’un vœu. Transformés en humains grâce à une formule magique, les voilà en quête. Lorsque Guignol rencontre la belle Émilie, elle aussi à la recherche du diamant pour sauver son père malade, c’est l’amour fou. Mais le sortilège n’accorde que 48 heures de vie avant la disparition de l’une des marionnettes, et un vœu seulement pourra être formulé.

Une œuvre qui respire la vie

La qualité du spectacle s’annonce immédiatement. Après un préambule dans la plus pure tradition Guignol, changement de décor : Monsieur Henry félicite ses « enfants » de bois et de tissus, avant de les ranger dans leur boîte, comme on couche des bébés. Mêmes gestes et chanson tendre, voix chaleureuse, ambiance intime. On est déjà séduit. Le sortilège n’est pas encore amorcé, mais le charme a opéré. Avec la scène de métamorphose, ses flocons magiques, sa chorégraphie pleine d’humour et sa chanson hymne de vie, la signature de la fine équipe est là.

© Philippe Frétault

C’est le musicien Sorel, (Julien-Axel Faintrenie) qui a voulu rendre à Guignol quelques lettres de noblesse en lui prêtant vie humaine. Il donne à sa composition des accents « beatlesiens », avec, dit-il, « des couleurs pop sixties » pour créer « un univers musical hors du temps ». Il entraîne dans l’aventure Anthony Michineau et Ned Grujic.

À chaque âge sa vérité

Un conte pour enfants ? oui, bien sûr. Guignol, blagueur et gentil, interpelle les petits, fuit le gendarme, la méchante, court dans tous les sens. Amusant, joyeux, accrocheur. Les enfants ne peuvent que s’emballer pour ce pantin devenu jeune homme, qui chante si bien et décoche des sourires enjôleurs. Redingote, catogan et tavelle, ce personnage si familier est, sur scène, un héros idéal, un charmant grand frère suscitant une adhésion pleine d’enthousiasme dans une atmosphère un peu magique.

Mais le spectacle propose plus, avec un savoir-faire exceptionnel. Dans un pitch d’apparence simple, dans l’esprit Guignol, sont présentes, en permanence, les notions de vie et d’amour, étroitement imbriquées avec celle du sacrifice. Jusqu’où est-on capable d’aller quand on aime ? Qu’est-on prêt à risquer ? Quand se sent-on vraiment vivant ? Ou enfermé ? Le sortilège de métamorphose fait glisser ces enjeux d’un bout à l’autre de la représentation. La « noble cause », objectif suprême de nos héros, est celle de l’amour. Le dénouement en est la plus belle des signatures. Une vraie profondeur.

De toute beauté

Un superbe mapping vidéo enveloppe les comédiens. Projetées sur le castelet, raison d’être ultime et précieuse de toute l’intrigue, des images à la Walt Disney figurent les lieux de l’épopée. À chacun ses codes couleurs, sophistiquées et poétiques : ambiance chaude de l’atelier, couleur myosotis du sortilège, ciel chamarré de la rue, or pour les rouages géants du « Grand Ben ». Des costumes assortis contribuent à cette esthétique raffinée. Une perfection visuelle de A à Z.

Incarnant 15 personnages, les six interprètes sont aussi à l’aise dans la comédie, le chant, les claquettes ou l’art du combat. Simon Draï est un délicieux Guignol, malice et jeunesse éclatantes. Margaux LLoret compose un personnage inattendu et drôle de méchante Betty, un peu dessins animés, un peu Miranda Priestly (le Diable s’habille en Prada). Vincent Gilliéron est un merveilleux Monsieur Henry et un gendarme loufoque à souhait. Aurore Blineau (Madelon), Victor Bourigault (Gnafron) et Lucie Mantez (Émilie) complètent ce casting irréprochable.

Voici un spectacle qui recèle mille pépites, dont cette course-poursuite en claquettes dans les rues de Lyondres, atmosphère Broadway et rythme endiablé… Alors, les enfants : emmenez donc vos parents ! 🔴

Florence Douroux


Guignol, le spectacle, de Sorel, Anthony Michineau et Ned Grujic

Site d’Indigo Productions
Imaginé et mis en musique par Sorel
Livret : Anthony Michineau
Paroles et mise en scène : Ned Grujic
Avec : Aurore Blineau, Victor Bourigault, Simon Draï, Vincent Gilliéron, Margaux Lloret, Lucie Mantez
Chorégraphie : Philippe Bonhommeau
Claquettes : Élodie Hec
Combats : Christophe Mie
Costumes : Corinne Rossi
Assistant mise en scène : Julian Bringer
Création marionnettes : Olivier Sion
Lumières : Alexandre Delabie
Création vidéo : Michael Xerri et Medhi Izza
Durée : 1 h 10
Dès 3 ans

Théâtre de la Gaité Montparnasse • 26, rue de la Gaité • 75014 Paris
À partir du 30 septembre 2023, samedi et dimanche à 11 heures, mercredi à 15 heures, et pendant les vacances scolaires, du mardi au dimanche à 11 heures
De 25 € à 42 €
Réservations : 01 43 20 60 56 ou en ligne

À découvrir sur Les Trois Coups :
Le Marchand de Venise, mis en scène de Ned Grujic, par Bénédicte Fantin
Les Producteurs, de Mel Brooks, par Maxime Grandgeorges

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