« Que crèvent tous les protagonistes » de Gabriel Calderόn, Théâtre 13 à Paris

Que-crèvent-tous-les-protagonistes-Sandrine-Attard © Marion-Florence

Que vivent les acteurs !

Par Laura Plas
Les Trois Coups

Sandrine Attard réussit à concevoir une mise en scène assez fine pour faire entendre la force et la fantaisie de Gabriel Calderόn et assez humble pour faire la part belle à une exceptionnelle bande de comédiens. Une réussite !

Chatoyante, l’écriture de Gabriel Calderόn explore des voies inconnues et incongrues. Ainsi, dans Que crèvent tous les protagonistes, le jeune prodige s’empare-t-il des codes de la science-fiction pour évoquer un sujet historique : la dictature qui secoua l’Uruguay dans les années 70.

Ana, une jeune trentenaire, obtient en effet que Tadeo, son amoureux transi, fasse revenir d’entre les morts les membres de sa famille. Ceux-ci la libèreront alors de la chape de silence qui l’étouffe. Mais évidemment, la machine à remonter le temps a ses ratés et les morts des séquelles ! Pas si facile d’affronter les secrets de famille…

Les inénarrables scènes de crises de nerfs familiales, les personnages loufoques font d’ailleurs souvent songer à l’univers du cinéaste Pedro Almodovar. Les retours en arrières et accents baroques de la pièce la transforment en gageure, mais Sandrine Attard relève le pari avec élégance et maîtrise.

Si la vie est ce théâtre, quelle belle vie !

Classique dans le bon sens du terme, sa mise en scène évite toute affèterie. Avec le savoir-faire humble d’un traducteur ou d’un restaurateur de tableaux, elle met en évidence toutes les teintes de la pièce et sa cocasserie. Venue de la scène, Sandrine Attard dirige avec pertinence les comédiens. Et quels comédiens ! Trois générations d’interprètes se partagent la scène sans qu’aucun n’écrase les autres. La direction semble faire feu des forces vives de chacun.

Gabriel Calderόn s’amuse de l’invraisemblance de la vie pour transfigurer la tragédie en divine comédie. Or, les acteurs parviennent à faire sentir cette oscillation entre larmes et rires. La jeune garde est menée par les tourbillonnants Maël Besnard, Paul Emile Pêtre et par la sensible Marion Malenfant. Dans la peau d’aïeux ravagés et délirants, Grégoire Oestermann et Elisabeth Tamaris leur tiennent la dragée haute.

Quant à Florence Müller et à Aymeric Lecerf, ils incarnent ce délicieux mélange de grossièreté et de lyrisme, bref d’humanité, que recèle le texte. Ils racontent l’envie de vivre ou de faire vivre les plus grands idéaux. Un beau travail, à découvrir donc impérativement. ¶

Laura Plas


Que crèvent tous les protagonistes, de Gabriel Calderόn

Mise en scène : Sandrine Attard

Avec : Maël Besnard, Aymeric Lecerf, Marion Malenfant, Florence Muller, Grégoire Oestermann, Paul Emile Pêtre, Elisabeth Tamaris

Durée : 1 h 40

À partir de 12 ans

Bande annonce du spectacle

Théâtre 13/Seine • 30, rue du Chevaleret • 75013 Paris

Du 4 au 23 novembre 2019, du mardi au samedi à 20 heures, et le dimanche à 16 heures

De 7 € à 22 €

Réservations : 01 45 88 62 22


À découvrir sur Les Trois Coups :

☛ Ouz et Ore, de Gabriel Calderόn, Théâtre des Quartier d’Ivry, par Laura Plas

☛ Juste la fin du monde, de Jean-Luc Lagarce, Théâtre 13, à Paris, par Laura Plas 

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