Sélection festivals printemps 2021

Oraison-Marie-Molliens-Cie-Rasposo © Laure-Villain

Dans le monde d’après…

Par Léna Martinelli
Les Trois Coups

Que d’effusions artistiques au cœur des villes, voire des campagnes ! La vie culturelle reprend de plus belle, sous toutes les formes, des plus petites aux plus spectaculaires, avec la promesse de grandes émotions.

Jusqu’ici, la culture se limitait à une jauge de 35 % de la capacité d’accueil en salle et en festival extérieur. À partir d’aujourd’hui, le couvre-feu recule à 23 heures et la jauge passe à 65 %, avec toutefois un seuil de 5 000 personnes à respecter. Voilà de quoi patienter jusqu’au retour à la normale prévu le 30 juin.

Autre nouveauté : le pass sanitaire. Obligatoire dans tous les événements de plus de 1 000 personnes, celui-ci est nécessaire à partir de 11 ans. Pour accéder au spectacle, il faudra présenter un QR code généré sur l’application #TousAntiCovid (imprimable depuis le portail Ameli.fr). Le pass attestera, au choix, d’une vaccination complète, d’un test PCR ou antigénique négatif (de moins de 48h), du résultat d’un Test RT-PCR ou antigénique positif attestant du rétablissement de la Covid (datant d’au moins 15 jours et de moins de six mois).

Pour célébrer comme il se doit les retrouvailles, plusieurs structures organisent des temps forts, entre séances de rattrapage et avant-goût de réjouissances estivales. Nous vous proposons donc une petite sélection. Autant de moments de rassemblement qui interrogent l’évolution de la création et du monde. De quoi piquer au vif les spectateurs, maintenant que beaucoup d’entre eux sont vaccinés.

De nouveaux événements

La Cie Jean-Michel Rabeux, qui n’en pouvait plus d’attendre, a imaginé son propre festival, du 4 au 12 juin au LoKal de Saint-Denis : « C’est le printemps et même s’il est pourri, ça reste le printemps et son sacre. Le sang accélère sa course dans les veines de tout le monde, il galope du cœur affolé jusqu’aux bouts des doigts de pied crispés par la solitude. On a donc accéléré pour concocter rapido un Temps Nu nu de toutes traces de confinement. On en a eu marre de la jachère forcée. On a décidé de remettre en culture, rouvrir les vannes, les veines, les portes, emmerder les mauvais augures, même si on aime les corbeaux, corneilles et autres chouettes magiques. Comme les fleurs dans les champs on a eu besoin de semer les graines qui s’agitent dans nos têtes depuis un an, de les voir croître et embellir, de les moissonner et de vous les offrir en gerbe. Ça s’appellera le Temps Nu [2], parce qu’il faut bien donner un nom aux navires qui prennent le large. »

Une autre compagnie, celle de Christian et François Ben Aïm, présente un programme dense justement intitulé Juin en joie FACÉTIES, Arise, Mirages − les Âmes boréales, Marche rond, tourne droit !, l’Ogresse des archives et son chien, Louves et Bird, sous forme d’impromptus pour un événement au sein du domaine de Sceaux. Des spectacles qui devaient tourner toute la saison. On est joyeux à l’idée de traverser ce mois-ci en leur compagnie !

Fins de saison festives

La MC2, maison de la Culture de Grenoble, consacre aussi un mois entier aux retrouvailles (La MC2 en fête du 9 juin au 9 juillet), de quoi découvrir quelques pépites ; tout comme le Théâtre 71, scène nationale de Malakoff, avec pas moins de dix spectacles dans le cadre d’Enfin l’été !, du 19 juin au 17 juillet. À la Fabrique des arts, dans des lieux amis, sur les places et dans les rues, il s’agit de fêter toute la diversité des arts vivants avec la population, invitée, au diapason avec les artistes, sur les plateaux, « libres de choisir les morceaux, de pédaler à plein tubes ou de savourer à distance ».

Résiste-Les-Filles-du-renard-pâle
« Résiste », des Filles du renard pâle, à Laval, dans le cadre de Sunny

Le Théâtre de Laval a, lui, opté pour Sunny, du 12 juin au 3 juillet : « Trois semaines de spectacles gratuits pour finir la saison sur une note ensoleillée ! » avec des funambules rock, des majorettes à moustache, une fête foraine pour escargot, du théâtre sous casque…

Des lieux inattendus seront aussi investis par Solstice qui conclut, depuis 2000, chaque saison du Théâtre Firmin Gémier / La Piscine. Du 18 au 27 juin, des artistes de cirque et des musiciens s’installeront donc à Châtenay-Malabry et Antony.

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« La Spire », de Chloé Moglia, Cie Rhizome, le 18 juin 2021 à l’Espace Cirque Antony, dans le cadre du Festival Solstice © Christophe Raynaud de Lage

Mêmes dates pour Le Mans fait son cirque, avec une 20édition exceptionnelle. Cet anniversaire témoigne de la forte dynamique circassienne. Depuis ses débuts, ce festival n’a cessé d’évoluer afin d’offrir un instantané de la création contemporaine, jusqu’à pouvoir envisager la perspective d’une labellisation nationale du Pôle Cirque et la construction d’un chapiteau permanent. La programmation est riche (plus de 80 représentations) et audacieuse, avec une attention particulière pour la création sur piste.

Les quatre artistes associés à cette édition sont emblématiques de cet exigence : les fortes personnalités que sont la chanteuse et trapéziste Samantha Lopez, le magique Yann Frisch, l’acrobate punk Aude Martos et le performer Johan Swartvagher vont se croiser lors d’une carte blanche inédite. Outre 4 solos de femmes de cirque, nous nous réjouissons aussi de retrouver Marie Molliens (cie Rasposo), avec sa Dévorée d’une sidérante beauté (lire la critique de Léna Martinelli), du cirque forain unique en son genre, et Cécile Mont-Reynaud (cie Lunatic), une belle découverte en perspective, avec là aussi un parcours 2 spectacles : Fileuse et De ses mains, des Objets Poétiques Non Identifiés, entre spectacles aériens et installation plastique ou sonore, qui font écho à l’architecture comme à la nature environnantes. À ne pas rater, Olivier Debelhoir qui tente un essai sur le fil (Une pelle) et du ski sur escabeau (L’Ouest loin), ou encore la haute voltige de cirkVOST.

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« Hurt me Tender » du CirkVOST, dans le cadre du festival Le Mans fait son cirque © Philippe Cibille

En ce printemps, le TDB, CDN de Dijon aurait dû organiser la 31e édition de Théâtre en mai. La version reconfigurée s’intitule malicieusement Théâtre enfin ! (jusqu’au 2 juillet), avec notamment l’Absence de père (lire la critique de Michel Dieuaide). Bruit, « festival de théâtre et de musique entremêlés », initialement prévu au Théâtre de l’Aquarium en janvier est lui aussi reporté (du 15 juin au 4 juillet) : « Ce mot comme un appel pour vous dire notre joie d’ouvrir (…). Ce sera la fin du printemps et les débuts de l’été sous les marronniers. »

Les incontournables

Parmi les pluridisciplinaires, le festival d’Automne à Paris, moins international mais plus nomade que jamais, « vous accompagne jusqu’à l’été », sans toutefois changer de nom, et cela jusqu’au 28 juillet avec, entre autres, un Portrait consacré à Boris Charmatz, les Entretiens silencieux de Bartabas ou encore l’Encyclopédie de la parole, un projet monstre passionnant, une collection qui comporte aujourd’hui plus de 1 000 documents (pièces sonores, performances, spectacles, conférences, concerts et installation) animée par un collectif d’experts de la parole.

Après l’annulation de l’édition 2020 (lire l’entretien de Trina Mounier avec Jean Varela), les retrouvailles s’annoncent pleines d’émotion au Printemps des comédiens, du 10 au 26 juin. Les habitués retrouveront Cyril Teste, toujours à la jonction du théâtre et du cinéma car il y crée la Mouette ; la circassienne Marie Molliens se rapproche encore un peu plus du théâtre, avec Oraison ; François Grémaud y reprend sa Phèdre (lire la critique de Lorène de Bonnay) et Jean-François Sivadier son Ennemi du peuple (lire la critique de Lorène de Bonnay).

L’édition des 75 ans des Nuits de Fourvière, jusqu’au 30 juillet, révèle une programmation surtout musicale. Des concerts prometteurs mais peu de surprises. Relevons toutefois l’adaptation, par Simon Delétang de Leurs enfants après eux, le récit d’une jeunesse de Nicolas Mathieu (prix Goncourt 2018), avec les étudiants de l’ENSATT, et FIQ ! (Réveille-toi !), du Groupe Acrobatique de Tanger (lire l’entretien de Sana El Kamouni avec Florence Douroux).

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« Rone », du collectif La Horde, dans le cadre des Nuits de Fourvière © Aude Arago

Évènement très attendu par les professionnels, la Biennale de la danse de Lyon a rongé son frein pendant neuf mois. Le temps d’accoucher d’un projet revu de fond en comble, à force d’annulations, remaniements, transformations. Les stars de la scène contemporaine internationale, comme Marlene Monteiro Freitas ou Dimitris Papaioannou, y présentent leurs derniers opus, jusqu’au 16 juin. Au total, près de 500 artistes et 22 créations 2020-2021 donnent l’élan de cette 19édition qui s’inscrit dans la saison Africa2020 de l’Institut français, en accompagnant des artistes de premier plan et émergents de 16 pays différents d’Afrique, un continent traversé par de multiples élans créatifs.

À Nantes, le Lieu Unique est d’ailleurs le quartier général d’Africa2020, Afrotopia. Le TU Nantes, quant à lui, accueille Bam bam bam, du 6 au 11 juin, une édition spéciale en France du Festival BAM implanté à Bamako. Porter cette manifestation en pleine crise sanitaire relève du génie. Entre reports, fermeture des lieux et des frontières, le nombre d’équation à résoudre pour son organisation, sa logistique et sa communication dépasse en effet l’entendement. Or, cette programmation est une formidable caisse de résonance des changements qui impactent la société africaine.

Découvertes et coups de cœur assurés

Outre les Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis qui se poursuivent jusqu’au 20 juin, ne pas manquer La 18édition du festival Trente Trente (jusqu’au 3 juillet) à Bordeaux Métropole Boulazac. Entièrement consacré aux formes scéniques courtes, cet événement propose des spectacles de différentes disciplines mais fait la part belle à la danse et aux formes performatives. Tout aussi « indiscipliné », TempsDanse #5 (du 5 au 25 juin) pratique l’ouverture sur l’extérieur. Comme chaque année, la coopérative de rue et de cirque 2r2c invite des compagnies qui font le choix du hors les murs, d’une proximité avec les spectateurs et l’espace vivant, vibrant tout autour : au pied d’un immeuble, au détour d’un jardin, sur une place publique…

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« After the End », de Denis Kelly, par Cabotine – cie Zabou Breitman, dans le cadre du Festival d’Anjou

Du 8 juin au 2 juillet, le Festival d’Anjou ne lésine pas sur les moyens : Jane Birkin, Agnès Jaoui, Michel Fau, Edouard Baer, Fabrice Luchini… Jean Robert Charrier, par ailleurs directeur théâtre de la Porte Saint-Martin depuis plus de dix ans, reprend des succès éprouvés qui méritent encore le détour, comme des Fleurs pour Algernon, avec l’impressionnant Gregory Gadebois qui remporta le Molière du seul en scène 2014, Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne de Jean-Luc Lagarce, mise en scène par Marcial Di Fonzo Bo, avec l’excellente Catherine Hiegel, ou encore After the End, de Denis Kelly, par Cabotine – cie Zabou Breitman, à découvrir.

Dernières bonnes notes

Et quid des temps forts musicaux ? Non, malgré le report de janvier, la Folle Journée ne sera pas silencieuse. Elle bat surtout son plein en Région des Pays de la Loire. Au programme (jusqu’au 6 juin) : 36 concerts et une myriade de chefs-d’œuvre de Bach et Mozart.

Créée en 2013 à l’initiative des Bouffes du Nord, La Belle Saison, dédié à la musique de chambre, porte bien son nom. Jusqu’au 12 juillet, une programmation prolifique devrait réjouir les amateurs dans 17 lieux partenaires, avec la venue récente du Festival de Chambord et du Festival Ravel de Saint-Jean-de-Luz.

Ensuite, ne pas hésiter à se mettre au vert dans le Val d’Oise, avec d’agréables échappées musicales à l’Abbaye de Royaumont (accessible à moins d’une heure de la gare du Nord, grâce un nouveau service de navettes gratuites). Après six mois de restauration de ce joyau patrimonial, la Fondation Royaumont revient avec un nouveau programme tout public. Jusqu’au 15 août, les dimanches à Royaumont proposent une rencontre musicale ou chorégraphique, ainsi qu’un atelier jeune public et une conversation dans le cadre privilégié du parc, du cloître ou des espaces historiques. 

Léna Martinelli

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