Le blues des minots
Par Céline Doukhan
Les Trois Coups
Un enfant qui ne sourit pas, et puis quoi encore ? Quand le garçonnet antihéros de « Sourires » devient obstinément triste du jour au lendemain, c’est l’incompréhension générale. Que peut‑il bien se passer dans cette petite caboche ? Et comment faire revenir un sourire sur ce minois attristé ? Ce sont là les questions qui agitent l’entourage du garçonnet et que le spectacle aborde avec délicatesse.
Comme le dit le metteur en scène Guillaume Barbot, il y a deux types de spectacle pour enfants. Dans le premier, on rit et applaudit à tout va. Sortez vos oreilles de Mickey… Le second s’adresse à la part plus intime et à l’intelligence de l’enfant. C’est bien sûr à ce deuxième genre, exigeant et sensible, qu’appartient Sourires.
Voilà un spectacle qui confirme que c’est dans le théâtre pour enfants que se nichent souvent des perles de sensibilité. Car le premier atout de Sourires, c’est d’arriver à se placer du point de vue de l’enfant. Oui, un enfant peut être profondément déprimé. Oui, un enfant peut être passionnément amoureux. Sans adopter une tonalité tire-larmes, le spectacle nous fait pénétrer dans leur ressenti personnel, tout en montrant également l’impuissance d’un entourage pourtant bienveillant, et ce, grâce à des moyens compréhensibles pour les enfants eux-mêmes. Par exemple, un pantalon figure la cabane dans laquelle se réfugie le petit garçon, tandis qu’un très « cartoonesque » docteur du sourire tente, par des moyens pour le moins inadaptés, de dérider le pauvre minot qui n’en demandait pas tant.
Le spectateur ressent donc bien la solitude éprouvée par l’enfant et sa conscience d’être incompris par son entourage. À cet égard, tout un travail a été fait sur la bande-son, qui agit souvent comme une matérialisation des sensations de l’enfant. Et il faut reconnaître que la petite marionnette elle-même est vraiment attendrissante ! Maëva Grandamme et Nadine Debien ont réussi à créer une petite figure toute simple, dont le visage s’orne tantôt d’un grand sourire, tantôt d’une expression d’une infinie tristesse. Mais la marionnette seule n’est rien : elle est ici maniée, à vue, par le merveilleux comédien Clément Bernot. La tendresse avec laquelle il manie le petit bonhomme, parfois tout près de lui, participe de cette évidente empathie générale des concepteurs du spectacle vis-à-vis des enfants.
Comme tous les bons spectacles pour enfants, celui-ci intéressera donc aussi les adultes, même si j’avoue avoir atteint mon seuil de tolérance (assez bas, il faut le reconnaître) en ce qui concerne les parties chantées de la bande-son. ¶
Céline Doukhan
Sourires, de Guillaume Barbot
Cie Coup de poker • Mairie, 6, rue de l’Église • 77850 Héricy
06 33 30 00 81
Mise en scène : Guillaume Barbot
Avec : Clément Bernot
Décors : Jean‑Baptiste Gleizes
Costumes : Cécilia Delestre
Lumières : Cécile Robin
Son : Julien de la Hautemaison
Musique : Mathieu Lamboley
Marionnette : Maëva Grandamme, Nadine Debien
Régie : Guillaume Tesson
Visuels : Morgane Legall
Photos : © Cie Coup de poker
Collège de La Salle • place Pasteur • 84000 Avignon
Réservations : 04 32 70°82 01 92
Du 8 au 31 juillet 2009 à 10 h 50
Durée : 45 minutes
9 € | 6 €