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« Battre encore », de La Mue/tte, Le Mouffetard théâtre des arts de la marionnette, à Paris

« Battre encore » © Frédéric Allegrini

Qui trop papillonne ne s’envole pas …

Par Laura Plas
Les Trois Coups

Parfois saisissant esthétiquement, « Battre encore » de la compagnie La Mue/ette, peine pourtant à créer sens et émotion. Pour sortir de sa chrysalide, le papillon aurait sans doute besoin de s’alléger de scènes redondantes et de clarifier ses visées. Du conte, restent de belles images.

Les héros, surtout quand ils sont des martyrs, rejoignent la légende. Il en est ainsi des sœurs Mirabal, assassinées par le dictateur Trujillo en République dominicaine. C’est pourquoi, sans doute, la compagnie La Mue/tte métamorphose leur histoire en conte rouge et noir où les sœurs deviennent femmes-papillons : des mariposas.

Seulement, un conte puise sa force de son épure ! Or, la proposition qui nous est faite ne cesse d’en brouiller les lignes. D’abord, elle semble tanguer entre référence historique et allégorie. Tantôt, on nous ancre dans le monde caribéen par les costumes, la diffusion d’archives sonores, tantôt on tend vers une dénonciation générale des dictatures, voire de la domination masculine.

Et justement, sur cette question fondamentale en soi et dans l’histoire de la compagnie, la narration semble patiner. Si le conte se nourrit de répétitions, si le chiffre trois y est matriciel, ici, la redondance de scènes de mise à mort étirent le spectacle. Alors que son ouverture est énigmatique et aboutie, il s’étiole ainsi progressivement.

La confusion des genres

La Mue/tte, comme son nom le suggère, trouve sa signature dans une réflexion sur l’hybridation. Elle trouble la distinction entre manipulé et manipulateur pour créer l’empowerment d’une femme à la fois castelet et manipulatrice. Les scènes les plus abouties de Battre encore poursuivent bien cette exploration. Simplement, des tableaux magnifiques coexistent avec des images insatisfaisantes (dans leur composition, dans le travail sur la lumière). Comme l’ogre que le conte dénonce, Battre encore ne sait pas se repaître : il régurgite des stéréotypes sur le féminin (femmes-fleurs, femmes-chevelure…), femmes dévoratrices ou perdues dans le fantasme du masculin (chevalier, fiancé, homme animal).

Peut-être, les artistes ont-ils conscience de brouiller la narration et le propos puisqu’une voix off vient nous rappeler les lignes de l’histoire ? Les mots viennent donc au secours de ce théâtre d’images. En somme, le spectacle présente de grandes qualités dans la manipulation, de très belles créations d’objets et d’images. Reste à faire un tri, à resserrer le propos pour être à la hauteur des faits mémorables qu’il rappelle.

Laura Plas


Battre encore, de la Mue/tte

Texte : Pauline Thimonnier

Mise en scène : Delphine Bardot et Pierre Thual

Assistante à la mise en scène : Margot Simonney

Avec : Delphine Bardot, Bernadette Ladener, Émilie Patard

Site de la compagnie

Durée : 1 heure

À partir de 14 ans

Le Mouffetard-Théâtre des arts de la marionnette • 73, rue Mouffetard • 75005 Paris

Du 12 au 25 novembre 2021, du mardi au vendredi à 20 heures, le samedi à 18 heures et le dimanche à 17 heures

De 13 € à 20 €

Réservations : 01 84 79 44 44

Site du théâtre


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☛ Chambre noire, d’après Sara Stridsberg, festival mondial des théâtres de marionnettes, Charleville-Mézières

☛ Graves épouses/ animaux frivoles, de Howard Barker, l’Atalante, à Paris

 

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