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« le Mois de Marie », de Thomas Bernhard, Théâtre des Halles à Avignon

le Mois de Marie © D.R.

Une satire pédagogique

Par Audrey Chazelle
Les Trois Coups

La chapelle extérieure du Théâtre des Halles abrite ce soir les vestiges d’un village bavarois, sagement préservés par deux vieilles dames bien conservées. Extrait des « Dramuscules » (des minuscules drames) de Thomas Bernhard, « le Mois de Marie » est une courte pièce sociale et ludique pour petits et grands.

La scénographie originale et volontairement figée de cette pièce, habitée par ses deux acolytes, apporte une légèreté nécessaire. Le charme et la drôlerie des interprètes nous fait entendre la violence d’un discours définitivement xénophobe, mais sans heurts. On sourit et on rit de ces reines de la « sagesse populaire » à l’espièglerie frelatée.

Ces deux jolies poupées endimanchées dans leur habit de folklore sont plantées à l’intérieur de la maquette d’un village de la Bavière, directement inspiré du village natal de l’auteur. Elles nous avisent de la récente disparition de M. Geissrathner, un « brave homme » du village, fauché par un conducteur turc.

Sous leur coiffe, se cachent en réalité deux comédiens travestis, qui jonglent avec les mots et se renvoient la balle. Toujours d’accord sur leurs principes, elles (ils) guettent le moindre passage de voiture, observent le travail du fossoyeur, prient avec les fidèles de l’église et commentent ces petits évènements qui tapissent leur quotidien.

Émerveillées d’un rien, ayant leur mot à dire sur tout, elles se nourrissent des ragots du village et alimentent leur vision restreinte du monde. Elles affichent un racisme débridé des années trente, où la peur de l’étranger habite les esprits.

Ces deux figures sont emblématiques de comportements sociaux qu’on aimerait voir mis à mal une fois pour toutes. En attendant, face à ces deux charmants bouffons, « hermaphrodites », on ne peut que s’en moquer de bon cœur.

En une symétrie parfaite, elles ponctuent leurs commentaires d’un revers de main, dodelinent au souffle du vent, éternuent par alternance et nous font un festival de mimiques et autres tics. On ne peut s’attarder trop longtemps sur l’une, l’autre a déjà changé de pose.

Pour un public de 7 à 77 ans, cette mascarade oscille entre le drame et la farce, où l’animosité contenue explose à la fin comme un volcan, savamment planqué sous la piété populaire du mois de mai (consacré à la Vierge Marie). Je vous conseille fortement de faire un p’tit détour de trente minutes du côté de chez eux… 

Audrey Chazelle


le Mois de Marie, de Thomas Bernhard

L’Autre Compagnie • 16, boulevard Rossillon • 83000 Toulon

06 60 80 67 39

lautrecompagnie@yahoo.fr

Mise en scène : Frédéric Garbe

Avec : Gilbert Traïna et Frédéric Garbe

Regard extérieur : Stéphane Bault

Conception décor et machinerie : Olivier Arnaud

Construction structure : Ateliers Sud Side

Univers sonore : Mathieu Hours

Régisseur : Germain Prévost

Costumes : Nina Langhammer et Virginie Bregère

Photo : © D.R.

Théâtre des Halles, jardin Sainte-Claire • rue du Roi‑René • 84000 Avignon

Réservations : 04 90 82 40 57

Du 5 au 27 juillet 2008 à 22 h 30

Durée : 30 minutes

7 € | 5 €

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