Il était une fois le théâtre
Par Bénédicte Fantin
Les Trois Coups
Après deux années de travaux, la salle Jardin du Théâtre 13 accueille la dernière création du metteur en scène à succès Alexis Michalik. Ce « huis clos sur un plateau », comme l’indique le sous-titre, est surtout une formidable porte ouverte sur l’imaginaire.
Quand Paul Jeanson nous demande : « Qu’est‑ce que le théâtre ? », on ne sait pas bien si c’est l’acteur ou le personnage qui s’adresse au public. D’emblée, le quatrième mur explose, et on décèle la signature d’Alexis Michalik qui aime nous interroger sur la frontière entre fiction et réalité. Une histoire a priori simple va être une tentative de réponse à la question introductive.
Un metteur en scène vient dispenser un cours de théâtre en prison, accompagné d’une de ses actrices – qui se trouve être son ex‑femme – et d’une apprentie assistante sociale. Face à lui, deux élèves-détenus : Kévin, jeune et vindicatif, et Ange, un homme mutique. Au fil de l’atelier, les personnages se dévoilent et leurs histoires finissent par s’entrecroiser.
On retrouve les procédés chers au metteur en scène : le travail sur la mise en abyme du « théâtre dans le théâtre », l’entremêlement de la petite et de la grande histoire, et surtout la réflexion sur le temps. La pièce se construit en effet autour d’allers-retours temporels permanents. Si bien que l’univers carcéral n’a ici rien d’étouffant.
La scénographie épurée permet de mobiliser l’imaginaire du spectateur et de ne pas s’enfermer dans un espace-temps donné. Au gré des récits et des interprétations de chaque personnage, on est transporté hors des murs de la prison.
Pour cette pièce, Alexis Michalik a renoué avec la méthode des improvisations dirigées, utilisée pour la création du Porteur d’histoire. Les acteurs sont invités à inventer à partir d’un canevas et leurs propositions sont ensuite retravaillées pour donner corps au texte définitif. Cette grande liberté de création se ressent dans l’interprétation des cinq comédiens qui font preuve d’une justesse confondante. L’énergie déployée sur scène est également impressionnante. Les acteurs changent constamment de personnage, de costume, d’époque, et enchaînent les scènes sans temps mort.
Le rythme est encore assuré par la présence sur le plateau du musicien Raphaël Charpentier qui accentue l’intensité du jeu et supplée l’épure des décors par des bruitages : pour signifier le passage par les différents sas d’entrée de la prison, pas besoin d’une logistique démentielle, les sons de portes blindées nous immergent aussitôt dans l’atmosphère carcérale.
Le résultat est ingénieux, drôle et émouvant. Avec cette troisième création, Alexis Michalik confirme son statut de talentueux raconteur d’histoires. ¶
Bénédicte Fantin
Intra Muros, huis clos sur un plateau, d’Alexis Michalik
Texte et mise en scène : Alexis Michalik
Avec : Jeanne Arenes, Bernard Blancan, Alice de Lencquesaing, Paul Jeanson, Faycal Safi
Musique : Raphaël Charpentier
Assistante à la mise en scène : Marie‑Camille Soyer
Lumière : Arnaud Jung
Scénographie : Juliette Azzopardi
Costumes : Marion Rebmann
Photos : © Alejandro Guerrero
Théâtre 13 / Jardin • 103A, boulevard Auguste‑Blanqui • 75013 Paris
Réservations : 01 45 88 62 22
Site du théâtre : www.theatre13.com/
Métro : Glacière
Du 9 mars au 16 avril 2017, du mardi au samedi à 20 heures, dimanche à 16 heures
Durée : 1 h 30
De 7 € à 26 €