Les Zébrures de printemps (festival des écritures), 3e édition, Région Nouvelle Aquitaine

Les-Lumières-d’Oujda-Capitaine-Alexandre © Elsa-Phouthonnesy

Bons anniversaires, Mister Zèbre !

Par Laura Plas
Les Trois Coups

Avec des tables rondes, des lectures d’œuvres parfois inédites, des projets inclusifs d’envergure, l’édition 2023 des Zébrures de printemps s’annonce généreuse, ouverte et festive, puisqu’on y célèbrera trois anniversaires, du 20 au 26 mars. L’occasion de dénicher quelques pépites théâtrales, sans bourse délier.

Troisième édition des Zébrures de printemps consacrées aux écritures ! On aura le plaisir d’y découvrir en prime time les opus d’autrices francophones aussi confirmées que Gaëlle Bien-Aimé (Port-au-Prince et sa douce nuit) ou Emmelyne Octavie (À Contre-Courant, nos larmes !), mais aussi les pièces d’écrivaines en devenir comme Reine Or de l’ivoirienne Fatou Sy ou le Silence qui sait tant de la rwandaise Claudia Shimwa. À suivre quand on sait que la Maison des auteurs-rices de Limoges, sorte de marraine la fée, a su faire émerger de sacrés talents, Wajdi Mouawad étant peut-être le plus notable, mais pas le seul.

Et cette année, c’est la fête ! Comme le dit avec sa langue poétique et généreuse, Hassane Kassi Kouyaté, son directeur : les petits-enfants des Francophonies rendent hommage à leurs aïeux. 40 ans de festival menés contre vents et marée, par-delà les continents et les îles, avec pour viatique la langue française et l’enthousiasme des pionniers et héritiers. Ils ont créé les résidences d’auteurs depuis 35 ans, la Maison des auteurs-rices qui souffle 30 bougies, et imaginé l’un des plus beaux prix : le prix Sony Labou Tansi des lycéens qui permet, chaque année, à plus de mille jeunes du monde entier de découvrir ce que le théâtre contemporain francophone a d’avant-gardiste et de pluriel.

L’œuvre ouverte, sous toutes ses formes

Pour être à la hauteur d’un tel héritage, les Zébrures se sont réinventées : aux lectures, s’est ajoutée une table ronde sur la traduction des dramaturgies  du continent africain, qui aura lieu le 25 mars, en collaboration avec la Maison Antoine Vitez. On y attend du beau monde : des traductrices, et Tiphaine Samoyault. Il faut y ajouter une émission radio en direct Sur les z’ondes du Zèbre, conçue en collaboration avec le théâtre Expression 7, qui permettra d’entendre les auteurs parler de leur parcours et de leurs œuvres.

Il y aura aussi un stage à destination des enseignants et des artistes, des projets nécessaires et enthousiasmants, comme celui des Sans PagEs, qui tente, en collaboration avec l’Université de Limoges, de réparer la sous-représentativité des femmes sur Wikipédia, ou celui qui associe des lycéens de la spécialité théâtre du Lycée Léonard Limosin à la célébration du Prix Sony Labou Tansi. D’une manière générale, le festival s’ouvre bien vers de nouveaux partenaires.

Mais l’ouverture la plus audacieuse est peut-être celle qui permet à des gens comme vous et moi de se lancer dans l’aventure de l’écriture. Des personnes du secours populaire ont écrit sous le regard bienveillant d’autrices comme Marine Bachelot Nguyen (voir notre article), Penda Diouf ou Karima El Kharraze : les veinards ! Leur œuvre, intitulée en toute logique Je me suis écrit sera mise en voix grâce à la compagnie Chausse-[Trappe], si attentive à la musicalité des langues, y compris étrangères.

Laurianne Baudoin, dont on a souvent apprécié la délicatesse (voir notre article), s’attèlera sur un temps très court aux écrits créés dans des ateliers sur la thématique de l’avenir. Et comme elle sera accompagnée, dans sa tâche, par le poète musicien Marc Alexandre Oho Bambe, dit Capitaine Alexandre, sensible à la douleur du monde autant qu’à sa beauté, on est impatient de découvrir C’est la terre qui gronde.

Choc des mots, musique des mots

Pas de thématique commune à cette édition, car c’est aux écritures théâtrales que le festival s’intéresse, leur donnant souvent un « devenir scène » lors des Zébrures d’automne. Mais, dans toute la programmation, on sent que la terre gronde.

On entendra ainsi des pièces qui croisent des thématiques intimes et politiques. Dans l’Obscurité de l’auteur ougandais Nick Makoha, dirigé par Thomas Visonneau, une mère et son enfant fuient le régime d’Idi Amin Dada, et on retrouve des personnages en butte à l’adversité des exils dans Les Vivants, le mort et le poisson frit de l’angolais Ondjaki, mis en lecture par Lara Borić. Cœurs battants de Valentine Sergo nous dévoile une histoire de couple en lutte contre la surexploitation des terres. Le texte sera d’ailleurs mis en voix par Matthieu Roy, dont on avait tant aimé Ce Silence entre nous.

On retrouve notamment les problématiques écologiques, dans Paysage à l’abandon de Danielle LeBlanc, qu’accompagnera la Compagnie des Indiscrets (voir notre critique de Joseph Java, l’interview), ou dans Léa et la théorie des systèmes complexes, écrit et dirigé par Ian de Toffoli. Un Instant d’éclat de la congolaise Pierrette Mondako évoque enfin les effets secondaires et délétères de l’indemnisation attribuée après une catastrophe (compagnie L’abadis). Bref, tous les auteurs prennent ici l’écriture au sérieux, comme une force qui, peut-être, ravage tout, qui, sans doute, nous incite à réfléchir.

Mais la langue est aussi un feu auprès duquel se réchauffer un instant, poème et chant. Les présences de Capitaine Alexandre, qui offrira la Vie Poème sur la musique de Caroline Bentz, ou de la fanfare Eyo Nlé, qui clôturera l’émission Sur les z’ondes du Zèbre, en attestent. On va frotter les mots, on va les faire guincher. La fête est ouverte à tous, d’autant que l’entrée est libre sur réservation. On trouvera de quoi se restaurer et le festival nous réserve d’autres surprises cachées dans le pelage d’un zèbre, bien en forme pour fêter ses anniversaires. 🔴

Laura Plas


Les Zébrures de printemps 2023

3e édition du 20 au 26 mars
Les Francophonies – Des écritures à la scène
Site de l’évènement
Entrée libre, sur réservation en ligne
Toute la programmation ici

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