« Peau de vache », de Pierre Barillet et Jean‑Pierre Grédy, Théâtre Antoine à Paris

Peau de vache © D.R.

Mi‑figue, mi‑raisin !

Par Isabelle Jouve
Les Trois Coups

Après le beau succès de « Fleur de cactus », Michel Fau, acteur et metteur en scène de talent, nous présente une nouvelle comédie du tandem Pierre Barillet et Jean‑Pierre Grédy. L’idée était plus qu’alléchante, le résultat mitigé.

Quarante ans après la création de Peau de vache au Théâtre de la Madeleine à Paris (mis en scène par le génial Jacques Charon), Michel Fau a proposé à Chantal Ladesou de reprendre le rôle-titre (interprété à l’époque par la grande Sophie Desmarets).

Marion, surnommée « Peau de vache » par ses frères quand elle était petite, est une femme au fort tempérament qui ne ménage pas son entourage. Elle coule néanmoins des jours heureux avec son mari Alexis, violoncelliste de renom, mais être un peu faible et lâche. Elle se voue entièrement à lui dont elle gère la vie, la carrière et les écarts. Elle rêve d’un monde sans intrus et autres gêneurs : « Je ne veux voir personne. Je hais l’humanité ! […] On ne protège jamais assez son intimité. Moi, je suis pour un fil de fer barbelé avec un courant à haute tension ». Tout semble aller pour le mieux jusqu’à l’arrivée de Pauline, une jeune journaliste plutôt timide et dévouée, qui va s’éprendre d’Alexis. On verra bien qui des deux est la plus méchante.

La mise en scène porte la patte de Michel Fau. C’est rythmé, virevoltant, et cette plongée en 1975 est rafraîchissante. Chantal Ladesou aime la scène, et ça se voit. Elle sait se sortir avec drôlerie de situations légèrement périlleuses (par exemple, quand elle perd l’équilibre et se retrouve pieds par-dessus tête dans la scène où elle se jette sur un pouf ou quand elle a un trou de mémoire). Bref, elle a une vraie connivence avec le public, c’est indéniable.

Ce rôle de teigne au franc-parler colle tout à fait à sa figure publique : « Marion, l’héroïne, dit tout ce qu’elle pense. Elle est cash. On dirait que [ça] a été écrit pour moi. ». Et c’est là que le bât blesse, me semble‑t‑il. Je n’étais pas venue pour voir un spectacle de Chantal Ladesou, virtuose du rire, mais une pièce de Pierre Barillet et Jean‑Pierre Grédy avec Chantal Ladesou. Seulement, la personnalité de la comédienne a pris le pas sur le personnage de Marion. Ce rôle lui ressemble peut-être trop pour que les spectateurs assistent à une véritable composition. On est loin du contre-emploi qui aurait pourtant été totalement jouissif. En outre, je n’ai pas compris plusieurs de ses répliques, car elle a un phrasé bien particulier et, à certains moments, elle n’articule pas. Je ne sais pas si c’est un parti pris du metteur en scène. En tout cas, cela n’apporte rien.

Mention spéciale à Urbain Cancelier

Michel Fau n’aime pas le minimalisme. « Le Théâtre Antoine me permet de réaliser un de mes délires […] avec une distribution survoltée ». Les autres acteurs suivent donc le rythme avec à-propos. Mention spéciale à Urbain Cancelier (popularisé par le rôle de l’épicier Collignon dans le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain) qui est excellent en vétérinaire alcoolique.

La scénographie de Bernard Fau est colorée et bucolique. On retrouve certaines de ses astuces, lui qui aime utiliser des éléments de décor coulissants. Chaque tableau est introduit par un court extrait d’une chanson populaire (C’est le cœur de Sheila, etc) et une indication temporelle projetée sur le grand rideau de scène. Les accessoires (totalement vintage) et les costumes (très seventies) assoient parfaitement la pièce dans son époque.

Dans le futur, il se dit que Michel Fau aimerait monter le Don d’Adèle. À suivre, donc. 

Isabelle Jouve


Peau de vache, de Pierre Barillet et Jean‑Pierre Grédy

Mise en scène : Michel Fau

Avec : Chantal Ladesou, Grégoire Bonnet, Anne Bouvier, Urbain Cancelier, Maxime Lombard, Stéphanie Bataille, Gérald Cesbron

Assistant mise en scène : Damien Lefèvre

Décor : Bernard Fau

Assistante : Natacha Markoff

Ensemblière : Leïla‑May Dalle

Costumes : David Belugou

Lumières : Joël Fabing

Création maquillages et coiffures : Pascale Fau

Photo : © D.R.

Théâtre Antoine • 14, boulevard de Strasbourg • 75010 Paris

Réservations : 01 42 08 77 71

Site du théâtre : www.theatre-antoine.com

Métro : Strasbourg-Saint-Denis

Du 8 septembre au 31 décembre 2016, du mardi au samedi à 21 heures, samedi et dimanche à 16 heures

Durée : 1 h 45

De 20 € à 63 €

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