Lettre à Flavie Avargues
Par Vincent Cambier
Les Trois Coups
Chère Madame,
Vous allez sans doute être surprise de cette critique de spectacle en forme de lettre. C’est peut-être parce que je ne suis pas un journaliste « classique ». Mais j’ose espérer que vous ne m’en tiendrez pas rigueur.
Je vous connais depuis presque vingt ans. Depuis les Caprices de Marianne [en 1995], que j’avais beaucoup aimés. Vous étiez déjà dirigée par Michel Bruzat, ce magicien de la mise au monde théâtral des comédiens.
Dès lors, j’ai vu presque tous vos spectacles à Avignon [voir les titres en lien plus bas]. Vous avez réussi à me surprendre, m’émerveiller, me faire rire et pleurer à chaque fois. Mais comment faites-vous ? Quel est votre secret ? D’où tirez-vous ce don qui me scotche à mon fauteuil ? Jusqu’à quelle profondeur de vos entrailles allez-vous fouiller pour extirper ce minerai physique que vous transformez en or dramatique, pépite que vous partagez avec autant de générosité ? D’où tenez-vous cette force avec laquelle vous maintenez votre public sous le charme ?…
Concernant votre spectacle de ce mois de juillet 2014, Big Bang ou la Vie d’un professeur de philosophie, figurez-vous que je l’avais vu joué par le maître Philippe Avron, en 1992 dans le Off d’Avignon. Eh bien, vous avez le toupet de soutenir fièrement la comparaison ! Là, à la limite, je pense que vous exagérez. Un peu de respect pour les anciens, quand même ! Vous pourriez avoir la décence élémentaire de mettre un peu de médiocrité dans votre talent.
Je sais bien que c’est votre incroyable énergie et votre profonde intelligence du texte qui vous emportent, qui vous amènent à de tels excès mordorés. Mais bridez-vous, bon sang ! Demandez de la tisane, un émollient, un calmant, à votre metteur en scène, je ne sais pas, moi, faites quelque chose !
D’un autre côté, pour être honnête, je dois reconnaître que l’on n’a pas du tout envie de vous voir faiblir, de mettre votre brio de clown (eh oui, vous orpaillez ça aussi !) sous un boisseau, d’étouffer votre voix, de voiler vos yeux, de cacher votre visage si expressif, d’éteindre votre sourire : en bref, votre beauté dramatique.
Bon, finalement, Madame, c’est à vous de voir. Je vous laisse carte blanche. ¶
Vincent Cambier
P.-S. Big Bang est intelligent et drôle, mais ça, vous le savez mieux que moi.
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Big Bang ou la Vie d’un professeur de philosophie, de Philippe Avron
Théâtre de la Passerelle • 5, rue du Général-du-Bessol • Limoges
05 55 79 26 49
theatre-de-la-passerelle87@wanadoo.fr
http://flavieavargues.blogspot.fr/
Mise en scène et scénographie : Michel Bruzat
Avec : Flavie Avargues
Lumière, photos : Franck Roncière
Costumes : Dolores Alvez Bruzat
Photo : Flavie Avargues dans « Big Bang ou la Vie d’un professeur de philosophie » | © Franck Roncière
Le Petit Louvre • salle Van-Gogh • 23, rue Saint-Agricol • 84000 Avignon
Réservations : 04 32 76 02 79
http://theatre-petit-louvre.fr/avignon/spectacles/salle-van-gogh/big-bang/
Du 5 au 27 juillet 2014 à 17 h 30
Durée : 1 h 10
17 € | 12 €