Dans les petits papiers de Virginia Woolf
Par Cédric Enjalbert
Les Trois Coups
Espace de recherche théâtrale, la salle Roquille et son intimité sied bien aux exercices littéraires dans un esprit de raffinement. Pour vous en convaincre, rendez-vous, sur réservation, à 19 heures jusqu’au 28 juillet avec Sylvie Boutley, pour une mise en jeu de fragments du « Journal » de Virginia Woolf.
Seule sur scène, Sylvie Boutley incarne à merveille une Virginia Woolf vieillissante, lasse et cynique. Dans un décor fait de quelques caisses empilées contenant livres et carnets, elle évolue au rythme d’un rangement-relecture, occasion de se retrouver un instant face à elle, de goûter avec un plaisir rétrospectif amer ses écrits : « Dans tout ce que j’écris, je suis une ratée. » Caisses et plancher se transforment bientôt en bureau, talent de l’écrivain qui transmute le monde en objet littéraire.
Excellemment dit, ce beau texte, qui se défend d’avoir une quelconque qualité littéraire, est à la fois pathétique et d’une ironie rare, celle d’un écrivain lucide à la personnalité « bizarre » et à la bouche aigre. En outre, des moments de pure poésie, comme cette description du lac rétenteur d’histoires passées, solution qui précipite le souvenir en cristaux blancs, viennent émailler des propos plus badins sur la cueillette des champignons… « Écrire ce journal, c’est comme de se gratter. »
C’est un doux moment de grâce que l’on passe en compagnie de cette actrice touchante, naturelle et tellement juste qu’est Sylvie Boutley. Il fait bon se retrouver dans son théâtre intimiste et savourer le plaisir du texte. Sans doute le meilleur remède contre ce constat que « le malheur est partout présent, juste derrière la porte, si ce n’est la stupidité ». ¶
Cédric Enjalbert
Jette un dernier regard
Mise en jeu de quelques pages du Journal de Virginia Woolf
De et par Sylvie Boutley
Salle Roquille • 3, rue Roquille • Avignon
Réservation : 04 90 85 43 68
Du 6 au 28 juillet 2007 de 19 heures à 19 h 50
10 € | 7 €