Show de sauts
« Salto » explore les limites. 11 acrobates, 11 parcours, 1 chrono… Le but : rester en l’air pendant 10 minutes. Toujours plus haut et plus longtemps ! Ce défi sera-t-il relevé ? Ou remis en question ? Les interprètes sont invités à user d’imagination et de stratégie. C’est chaud ! Mais ce show est avant tout une réflexion sur le grand saut, que chacun choisit (ou pas) de faire. Un spectacle vitaminé qui questionne de multiples enjeux sociaux, nos prises de décision et nos modes d’action.
Trampoline, bascule, barres russes, escaliers amovibles… Tous les agrès sont bons pour dynamiter les lois de la gravité et s’adapter à l’environnement : s’échapper, se protéger, attaquer. Seul, à deux, à trois ou plus, les figures sont élaborées, avec des portés originaux, dans une ingénieuse scénographie sur plusieurs niveaux. Pensé comme une aire de jeux, l’espace laisse la place à l’affrontement et à la collaboration. Apparitions et disparitions, courses et échappements, répliques gestuelles ou parlées se jouent à la seconde près dans un ballet acrobatique qui s’annonce comme un grand show, avec chronomètre et musique électro qui donnent le tempo. Et que ça saute !
L’œuvre, chorale, repose sur une belle complicité entre les interprètes, virtuoses. La prise de risque face au vide est réelle. Avec détermination, certains essaient, réussissent avec brio, tandis que d’autres butent, essaient encore et encore. Braver les dangers, prendre sur soi afin de dépasser ses limites, peut donner des ailes. Tentative d’élévation ou d’évasion, le saut raconte des parcours de vie, entre rites de passage – propres à tout envol – et épreuves plus ou moins difficiles, qui peuvent aboutir aux plombs qui sautent, autrement dit le burn-out. Car la liberté s’arrache souvent, qu’on fasse ou pas le grand saut ! « Faire de la peur de sauter, un moteur pour avancer », estime Edward Aleman. Toutefois, refuser le vertige est également une prise de décision respectable.
Voltige de haut niveau ou élans vers l’ailleurs ?
Si l’énergie communicative est le ciment du spectacle, ce que chacun met en œuvre (individuellement mais aussi en s’appuyant, ou non, sur la force du collectif) dit beaucoup des personnalités et des rapports humains. Les inégalités ne sont-elles pas criantes ? Les prises de paroles – percutantes – évoquent les déterminismes sociaux : origines (pas moins de sept nationalités différentes dans cette compagnie cosmopolite), rapports au corps, liens familiaux, opinions politiques, anecdotes… Quelques minutes suffisent à dévoiler des parcours atypiques.
Qu’elles soient au sol, dans les airs, toutes les acrobaties semblent finalement possibles, grâce aux rebonds. Salto est de la haute voltige qui mène vers des ailleurs insoupçonnés : « Moi, j’utilise mon corps comme outil de résistance, objet de transition et vecteur de changement social », ajoute Edward Aleman. Sauter n’est pas qu’un geste physique, c’est également une façon de se déplacer et d’agir, porté par la solidarité du groupe. Ce spectacle sur « la nécessité de s’entendre, de faire ensemble » est un chœur palpitant. 🔴
Léna Martinelli
Salto, d’Edward Aleman
Cie El Nucleo
Auteur et dramaturge : Ronan Chéneau
Mise en scène : Edward Aleman et Sophie Colleu
Avec : Edward Aleman, Alexandre Bellando, Birta Benonysdottir, Célia Casagrande-Pouchet, Fanny Hugo, Hicham Id Said, Jimmy Lozano, Mohamed Nahhas, Gianna Sutterlet, Daniel Torralbo-Perez, Amaia Valle
Collaboration à la chorégraphie : Pierre Bolo
Composition musicale : Alexandre Bellando
Scénographie : Thomas Cartron
Costumes : Marie Meyer
Direction technique : Laurent Lecoq
Création lumière : Zoé Dada
Production et Diffusion : Florent Bourgetel
Durée : 1 h10
Dès 8 ans
Points communs – Nouvelle scène nationale Cergy-Pontoise / Val d’Oise • Théâtre des Louvrais • Place de la Paix • 95300 Pontoise
Du 24 au 26 mai 2024
De 6 € à 25 €
Réservations : en ligne ou au 01 34 20 14 14
Dans le cadre de l’Olympiade culturelle Val d’Oise
Tournée ici :
• Du 9 au 14 juillet, dans le cadre du Festival d’Alba-la-Romaine, PNC Rhône-Alpes (07)
• Du 17 au 22 décembre, Les Célestins, Théâtre de Lyon (69)
À découvrir sur Les Trois Coups :
☛ « Somos », cie Bêstîa, par Léna Martinelli
Photos : © Arnaud Bertereau
